Franceinfo - le mercredi 19 juin 2019
Privatisation du marché des semences, tomates hybrides... Quatre séquences à retenir du "Cash investigation" sur le business des fruits et légumes
L'enquête diffusée mardi soir sur France 2 démontre que les semences agricoles mondiales sont détenues et gérées par quelques multinationales
Un étalage de tomates dans un supermarché parisien, le 28 mai 2019. (MAXPPP)
Des fruits et légumes calibrés comme des produits industriels et des semences totalement standardisées. France 2 a diffusé, mardi 18 juin, "Multinationales : hold-up sur nos fruits et légumes", un nouveau numéro de "Cash Investigation". Une enquête qui démontre que les semences à l’origine des fruits et légumes mangés par les consommateurs sont désormais la propriété d’une poignée de géants mondiaux, comme l'allemand Bayer ou le français Limagrain. Voici quatre séquences à retenir de cette enquête sur ces multinationales qui dominent le marché des fruits et légumes.
>> REPLAY. Revoir l'émission "Cash Investigation" sur le business des industriels des fruits et légumes
Comment les tomates hybrides ont envahi le marché
Pour obtenir la star du rayon primeur, des industriels proposent des semences de tomates. Ces vendeurs de graines mettent en avant des arguments tels que la forme, la taille, la couleur ou encore la productivité. Mais surtout, les semences hybrides représente 98% des variétés de tomates mises sur le marché.
Un hybride n'est pas un OGM, on ne modifie pas les gènes, on les croise. Ainsi, on peut obtenir, grâce aux semences hybrides, des tomates bien rouges, à la chair qui résiste aux chocs et dont la conservation permet de survivre aux parcours commerciaux.
Un marché des semences privatisé qui menace la biodiversité
Selon la loi française, pour avoir le droit de vendre une semence, une entreprise doit l'inscrire au catalogue officiel français des espèces et variétés de plantes cultivées en France. Ce catalogue compte actuellement 8 353 variétés. Mais cette diversité n'est qu'une apparence. Ainsi, dans le cas du melon, 289 noms de variétés sont recensés. Mais 91% de ces melons sont des hybrides de moins de 25 ans. Quant au maïs, sur 1 019 variétés, toutes sont des hybrides créées dans les années 2000. Et ces semences de maïs sont presque toutes la propriété de grands groupes.
Aujourd'hui, les deux tiers des semences vendus dans le monde appartiennent à quatre multinationales : Bayer-Monsanto, DowDuPont, Syngenta et Limagrain. Cette privatisation du vivant n'est pas sans conséquences pour la biodiversité. Selon l'ONU, "75% de l'agrobiodiversité a été perdue à cause de la domination de ces variétés uniformes." Par ailleurs, trois des quatre multinationales qui dominent le marché semencier sont également des fabricants de pesticides. Une façon de proposer aux agriculteurs des formules tout compris, en promettant un meilleur rendement pour une graine associée au pesticide produit en parallèle.
Le grand chef qui refuse la mainmise des multinationales sur les semences
Trouver des légumes qui ne sont pas des hybrides relève du parcours du combattant. Le chef cuisinier Olivier Roellinger cultive ses propres légumes – des semences paysannes – au pied de son restaurant à Cancale (Ille-et-Vilaine). Il déplore notamment un catalogue officiel où le critère principal pour intégrer les semences est le caractère homogène et stable des légumes.
"Je n'arrive même pas à comprendre comment on a pu (...) se faire spolier ce droit de planter ce que la nature nous a donné", s'indigne Olivier Roellinger.
Quand un petit producteur de graines paysannes illégales fait face au lobby des semenciers
L'association Kokopelli tente de résister aux industriels en commercialisant et en distribuant des semences paysannes, c'est-à-dire libres de droits, non répertoriées dans le catalogue officiel. Des actions illégales qui valent à Kokopelli des procès intentés par les multinationales.
L'association revendique un rôle de résistance afin de préserver le "bien commun", c'est-à-dire celui que la "nature nous a tous donné".
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