GEOGRAPHIE-TERRITOIRES
L'étude de la planète, ses terres, ses caractéristiques, ses habitants, et ses phénomènes. Une traduction littérale serait «décrire ou à écrire sur la Terre".
Franceinfo - le mardi 5 février 2019
Le Nord magnétique fonce du Canada vers la Sibérie
Le Nord magnétique se déplace de 55 km chaque année
Jadis situé au Canada, le nord magnétique se dirige vers la Sibérie. (ILYA NAYMUSHIN / REUTERS)
Le Nord géographique n'est pas le Nord magnétique. Ce dernier se déplace en ce moment à une vitesse de 55 kilomètres par an, ce qui a forcé les scientifiques à publier cette semaine un nouveau modèle magnétique, indispensable à de nombreux systèmes de navigation. Le Modèle magnétique mondial (World Magnetic Model) est utilisé pour la navigation aérienne et maritime des armées, mais aussi par les boussoles de nos smartphones. Il est mis à jour tous les cinq ans, mais le dernier modèle, datant de 2015, s'est avéré en décalage important par rapport aux observations réalisées à la fin de l'année 2018.
Le champ magnétique terrestre est généré principalement par le mouvement du fer liquide qui compose la majorité du noyau terrestre, à 3 000 km sous la surface. C'est ce qui fait dériver les pôles magnétiques. Le modèle permet de corriger la direction indiquée par la boussole afin de retrouver le nord géographique, qui est fixe. La découverte du Nord magnétique, dans le nord du Canada, date de 1831. Les scientifiques des agences atmosphériques américaine et britannique (NOAA et BGS) ont publié lundi une mise à jour urgente du modèle, avant une prochaine actualisation normale fin 2019.
Un mouvement "très lent" mais "bien réel"
Concrètement, si on comparait la direction indiquée par l'aiguille d'une boussole depuis la France entre aujourd'hui et il y a deux siècles, il y aurait une différence d'une vingtaine de degrés, explique à l'AFP Arnaud Chulliat, géophysicien à l'Université du Colorado à Boulder et à la NOAA. "C'est un mouvement très lent mais qui est bien réel. Sur plusieurs décennies, cela peut atteindre plusieurs degrés", dit-il. Ce décalage n'a pas beaucoup d'importance dans les latitudes les plus peuplées, mais "près du pôle magnétique, le changement est plus rapide".
Le Nord magnétique, au fil des siècles, s'est déplacé de façon plus ou moins imprévisible dans les archipels du Grand nord canadien. Depuis la fin du XIXe siècle, il file en direction de la Sibérie. Depuis les années 1990, le mouvement s'est accéléré, à travers l'océan Arctique, la vitesse passant d'environ 15 km/an à 55 km/an aujourd'hui.
Comment mesure-t-on ce champ magnétique? Les chercheurs se rendaient autrefois sur la banquise pour réaliser des mesures et localiser le Nord magnétique, l'endroit où l'aiguille d'une boussole pointerait exactement à la verticale. Arnaud Chulliat et des collègues ont fait une telle expédition en 2007. Des observatoires mesurent aussi le champ magnétique. Mais les données les plus utilisées aujourd'hui viennent des trois satellites Swarm, lancés par l'Agence spatiale européenne en 2013.
le Progrès du samedi 29 juillet 2017
Un navire de recherche est parti d'Australie pour sonder une gigantesque masse terrestre sous l'Océan pacifique, que des scientifiques voient comme "un nouveau continent".
Et si un nouveau continent se cachait sous l'Océan pacifique ? Hier, un navire de recherche est parti d'Australie pour tenter de percer les mystères de Zealandia, un espace essentiellement immergé que les scientifiques pensent être un nouveau continent. À l'air libre, cette immense masse terrestre ne laisse voir que la Nouvelle-Calédonie et la Nouvelle-Zélande. Le reste, 95 % des 4,9 millions de kilomètres de Zealandia, se trouve sous l'Océan.
Des chercheurs australiens, néo-calédoniens et néo-zélandais ont publié en février dans GSA Today, le journal de la Société américaine de géologie, un article détaillant les raisons pour lesquelles ce vaste espace, dont l'existence est évoquée depuis 1995, devrait être considéré comme un continent. Une conclusion qui ne fait pas consensus dans la communauté scientifique.
Pour eux, Zealandia répond à quatre critères fondamentaux de la définition d'un continent, qui sont aujourd'hui entre 4 et 7 selon les classifications retenues pour répertorier l'Afrique, l'Eurasie (parfois scindé en Europe et Asie), l'Amérique du Nord, l'Amérique du Sud, l'Antarctique et le continent australien.
Tout d'abord, l'élévation de Zealandia par rapport aux alentours. Ensuite, sa géologie propre, sa forme bien délimitée, la structure et l'épaisseur de sa croûte. Seuls 25 kilomètres séparent cette masse du continent australien ans la partie la plus étroite mais, relèvent les scientifiques, la dépression océanique y plonge à 3 600 mètres de profondeur.
Un bateau de recherche scientifique utilisé pour les forages en mer va faire des prélèvements afin de mieux comprendre l'évolution géologique de la zone.
Si on vidait les océans...
Les roches et sédiments prélevés seront étudiés à bord. L'un des principaux contributeurs de l'étude publiée en février, Nick Mortimer, avait expliqué que des chercheurs rassemblaient depuis 20 ans des éléments défendant l'existence d'un continent.
Mais leurs efforts ont été compliqués par le fait que Zealandia est noyé sous les eaux. "Si l'on pouvait vider les océans, les chaînes de montagnes et cette énorme masse continentale sauteraient aux yeux", avait-il dit, espérant que Zealandia figurerait un jour sur "les cartes et dans les écoles".
Pour les chercheurs de l'expédition, "l'intérêt scientifique de classer Zealandia comme un continent va bien au-delà du simple fait d'ajouter un nom sur cette liste. Qu'un continent puisse être ainsi immergé mais pas fragmenté est utile à la compréhension de la cohésion et la destruction de la croûte continentale".
le Progrès du dimanche 19 février 2017
OCÉAN PACIFIQUE - UN NOUVEAU CONTINENT DÉCOUVERT
Large de cinq millions de kilomètres carrés, et situé au nord-est de l'Australie, ce territoire s'appelle Zealandia. Il comprend la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, les îles Norfolk, quelques îlots et récifs, mais près de 95 % de sa superficie se situe sous la surface de l'Océan pacifique. Et selon une étude publiée dans la revue The Geological Society of América, il s'agit bien d'un continent au même titre que les six autres.
Zealandia serait un nouveau continent dont les seules terres émergées seraient la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie
le Progrès du vendredi 13 janvier 2017
TERRITOIRES - LES FUSIONS LOIN D'ÊTRE ACHEVÉES DANS LES FAITS
Les exécutifs des sept nouvelles régions ont pris en main la compétence économique, mais n'ont pas révolutionné les organisations ni revu les politiques de fond en comble. Pour le moment, les fusions ne dégagent pas de pistes d'économies.
Depuis un an, sept nouvelles grandes régions redessinent la carte de France. Leurs nouveaux exécutifs, après consultations d'experts et des habitants par internet, les ont rebaptisées. Par simple addition des noms des anciennes régions (Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté), références à l'histoire (Normandie, Nouvelle Aquitaine, Occitanie) ou à la géographie (Grand Est, Hauts-de-France). C'est à ce jour le changement le plus visible pour leurs habitants.
Ils auront néanmoins pu apprécier la continuité des services publics que les régions assurent dans les lycées et le TER. Les aides aux entreprises (+ 4,8 %) et les investissements (+ 3 %) ont augmenté sur les budgets 2017, preuve que les régions ont la volonté de se consacrer pleinement à la mission économique que leur attribue la loi Notre.
Les agents, le sujet sensible
La fusion n'engendre donc pas de catastrophe. Mais elle ne génère pas on plus à ce stade les convergences attendues pour réaliser des économies de masse sur le fonctionnement même si Auvergne Rhône-Alpes affiche 17 millions d'économies sur les moyens généraux.
Aucun ancien siège n'a été fermé. Des maisons ou antennes décentralisées ont même été créées dans le Grand Est pour pallier l'éloignement d'une capitale excentrée. Selon l'association des DRH des collectivités locales, la réorganisation des services n'a abouti "ni à des mobilités contraintes ni à des suppressions de postes d'agents". De toute façon le statut de fonctionnaire et les reformes des retraites ne le permettent plus : à partir de cette année, les fonctionnaires travaillent deux de plus que ceux ayant cessé l'activité en 2012, ce qui ralentit le rythme des départs.
Le nombre de directeurs de service n'a pas augmenté mais celui des directeurs adjoints a doublé. Et souvent, les postes doublonnent sur deux sites. Des situations que les élus justifient par la nécessité de garder une proximité compte tenu de la taille des régions et la volonté de ne pas centraliser tout dans des métropoles (Bordeaux, Strasbourg, Toulouse). Ainsi en Bourgogne-Franche Comté, le chef-lieu est à Dijon et la présidence à Besançon ce qui ne va pas sans grogne du personnel : hier les agents manifestaient contre les transferts de poste et la multiplication des allers-retours entre les deux villes.
En Occitanie, les vice-présidences sont doublées entre Toulouse et Montpellier comme en Normandie entre Rouen et Caen, et les effectifs sont conservés. En réalité, les exécutifs n'ont pas encore lancé le processus d'alignement des salaires, primes et avantages des agents, qui peut vite s'avérer coûteux pour le fonctionnement. Ils ont rarement harmonisé les tarifs et gratuités des TER, les dotations aux lycéens (ordinateurs, équipements, bouses), les aides aux entreprises, aux associations, à la culture, qui là aussi tireront les dépenses vers le haut.
Fiscalité : pas de hausse à attendre
Le chantier de l'emploi et de la formation, hérité de la loi "Notre" qui renforce leur compétence sur ces terrains, ne démarrera qu'après la présidentielle, les candidats ayant tous des visions différentes de cette priorité. Il a permis aux présidents de région d'obtenir du gouvernement Valls des moyens financiers pour éviter de prendre des décisions fiscales douloureuses sur la taxe foncière, les cartes grises ou la maigre part de taxe sur les carburants, les rares contributions visibles que les régions décident.
Une part de TVA leur sera rétrocédée par l'État dès 2018 avec garantie d'évoluer jusqu'à 3 % par an. Et 500 millions leur sont attribués pour les programmes d'investissement d'avenir. Seul bémol : cette nouvelle fiscalité calculée sur la démographie avantagera les régions qui gagnent le plus d'habitants. Le chantier de la fusion des grandes régions reste donc ouvert en 2017. Et sans doute pour quelques années. Pascal Jalabert
le Progrès du jeudi 6 octobre 2016
TERRITOIRES - CONGRÈS. RSA, LE FARDEAU DES DÉPARTEMENTS
Les conseils départementaux tirent la sonnette d'alarme sur leur situation financière et l'explosion, de leurs dépenses sociales, en particulier celles liées au Revenu de Solidarité Active.
"L |
e gouvernement, sans aucune concertation, signe des chèques en bois, avec le chéquier des départements", dénonce Dominique Bussereau, président (Les Républicains) de l'Assemblée des départements de France (ADF). L'augmentation de 2 % du RSA au 1er septembre, décrétée par le gouvernement, passe mal dans les départements, en majorité de droite.
RSA + 9 % par an depuis 2012
Annoncée à la veille du Congrès de l'ADF, cette hausse vient amplifier la colère des élus départementaux sur ce dossier et celui, plus global, de l'augmentation des dépenses sociales à leur charge sur fond de réduction des recettes. Réunis jusqu'à demain à Poitiers, ils veulent passer à l'offensive. À sept mois de la présidentielle, ils doivent adopter une série de proposition dans ce domaine, entre autres. Ils présenteront leur feuille de route le 2 février aux candidats.
Le Revenu de Solidarité Active, c'est le "gros morceau" de l'aide sociale des départements. Perçu par 2,5 millions de foyers, il représente 58 % du montant des trois Allocations Individuelles de Solidarité. Depuis 2012, les dépenses du RSA progressent de 9 % en moyenne par an sur fond de chômage record.
En 2015, elles ont atteint 10,2 milliards dont 4 restés à la charge des départements (contre 3,3 en 2014). "Les 2 % supplémentaires pour les bénéficiaires, c'est 300 millions en plus pour les départements", souligne Pierre Monzani, directeur général de l'ADF.
Encore dans le rouge en 2016
Or, une quarantaine de conseils départementaux prévoient déjà d'être dans le rouge en 2016. La promesse du ministre des Collectivités Jean-Michel Baylet de débloquer 200 millions en fin d'année pour garantir en décembre le versement du revenu minimum aux personnes sans ressources ne calme pas la colère. L'an dernier, le problème s'était posé pour une dizaine de département et l'État avait mobilisé, dans l'urgence, une aide de 50 millions dont dix pour le Nord. L'équivalent de quatre jours de RSA, avait ironisé Jean-René Lecerf, son président : le budget mensuel du RSA atteint 65 millions dans le Nord.
Renationalisation dans l'impasse
Dans ce contexte, le projet de Manuel Valls de "renationaliser" cette allocation de solidarité à partir de 2017 avait initialement été accueilli favorablement. Mais les négociations ont échoué en juin. Dans l'impasse, l'ADF, de menaces en propositions, réclame une refondation complète de ses dépenses sociales qui s'élèvent à 36 milliards. D'autant que les départements affrontent des besoins nouveaux.
La prise en charge des mineurs étrangers a explosé passant de 1 000 bénéficiaires en 2002 à 10000 en 2016 pour un coût de 50 000 euros par personne et par an. L'Allocation Personnalisée d'Autonomie versée aux plus de 60 ans progresse également, sous l'effet du vieillissement de la population : + 1,6 % en 2015 et plus d'1,2 million de bénéficiaires. Dominique Bussereau a alerté : "L'APA devient un problème plus grave même que le RSA dans certains départements, comme les Ardennes".
535 Le Revenu de solidarité (RSA) s'élève à 535 euros par mois pour une personne seule sans ressources. En 2010, il s'élevait à 460 euros.
Pour une personne seule avec enfant, il passe à 786 euros, et 943 pour un(e) célibataire avec deux enfants. Un couple touchera 786 euros.
le Progrès du lundi 3 octobre 2016
INÉGALITÉS - LA CROISSANCE ET L'INNOVATION SE CONCENTRENT DE PLUS EN PLUS DANS LES MÉTROPOLES
Ces Français qui se sentent abandonnés
Les inégalités entre métropoles riches et territoires en difficulté se creusent comme le raconte le géographe Christophe Guilluy dans le crépuscule de la France d'en haut. Un enjeu majeur de la présidentielle et pour l'avenir de 40 % des Français.
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a France des oubliés, la France des territoires abandonnés... À sept mois de la présidentielle, tous les candidats cherchent comment récolter les suffrages de ce peuple des campagnes et des bassins industriels en déshérence, des villes moyennes et de gros bourgs ruraux en déclin, de communes dites périphériques où l'on s'installe par obligation financière plus que par envie. "Les paysages de l'histoire de ces territoires sont différents, mais le sentiment d'abandon par les pouvoirs publics et de décrochage dans l'économie mondialisée est partagé par leurs habitants", constate l'économiste Laurent Davezies.
Tout pour les métropoles
Selon un rapport de France Stratégie, organisme financé par l'État, entre 2000 et 2015, les inégalités entre les territoires se sont creusés comme jamais au cours du siècle précédent. Paris et les douze plus grandes métropoles concentrent 78 % des activités créatrices d'emploi et de valeur ajoutée. Le revenu disponible par habitant y est de 50% plus élevé que dans le reste du pays. Avec quelques bassins frontaliers dynamiques (Savoie, Pays basque, Alsace), ces 13 "géants" aspirent la richesse, les diplômés, l'investissement étranger, l'élite médicale.
Pouvoirs publics impuissants
Les politiques publiques ont amplifié le sentiment d'abandon en fermant administrations, tribunaux, postes, gares, et en n'instaurant pas une vraie péréquation entre collectivités riches et pauvres. Révélateur de cette fracture : le dépliement de la fibre optique. Sur les dix millions de foyers et de sociétés raccordées, sept millions vivent dans le Grand Paris ou dans les dix premières aires urbaines. Président de l'assemblée des départements de France, Dominique Bussereau constate : "Si 40 départements peinent à payer le RSA et/ou l'allocation personnes âgées, ce n'est pas parce qu'ils sont moins bien gérés mais parce que le nombre d'allocataires augmente et que l'économie ne procure pas assez de richesse".
Mouvement irréversible
Pour France Stratégie et beaucoup de spécialistes, le mouvement est irréversible. "L'égalité des territoires n'est plus un objectif raisonnable. La question, c'est l'égalité des citoyens", note Laurent Davezies. France Stratégie s'aventure plus loin : "Les politiques publiques doivent donc favoriser le dynamisme des métropoles à travers la recherche, les équipements, l'économie et organiser une redistribution sociale vers ces zones en difficulté".
Il ne s'agit pas de combattre mais de gérer la fracture territoriale. Politiquement, cette stratégie est invendable. "Nos lois sont trop urbaines, trop tournées vers les métropoles", avertit Gérard Larcher, président LR du Sénat, qui veut placer le sujet au centre de la présidentielle.
Défilé de politiques
De droite ou de gauche, au pouvoir ou aspirant à y parvenir, les politiques de tous bords multiplient les déplacements dans ces territoires pour célébrer le dynamisme de PME innovantes et de quelques petites villes heureuses, Saint-Flour, Pontarlier, Sarlat, le Pays basque intérieur, pour ne citer que quelques contre exemples méritoires au mouvement de déclin.
Lors de comités interministériels à Vesoul et Bourg-en-Bresse, le gouvernement a proposé des mesures, des programmes économiques fléchés vers la ruralité au sens large et le périurbain éloigné. Les crédits débloqués et complétés par des fonds européens et les régions ne sont pas négligeables.
Mais cela ne fait pas rouvrir les usines, les fermes, les écoles et les commerces "à céder". Deux chiffres illustrent les déchirures du tissu économique : en 15 ans, coopératives viticoles et agricoles ont perdu 8 000 salariés, selon la mutualité sociale agricole. Un commerce sur deux n'a pas été repris dans les bassins d'emplois de 100 000 habitants.
Le FN laboure, mais n'est pas seul
Marine Le Pen s'érige en porte-parole de ces populations où les immigrés sont peu représentés. Hors la Côte d'Azur, métropole en croissance où l'implantation du FN est ancienne, la carte de ses meilleurs scores se superpose à celle des territoires en souffrance. "Mais ce votre reste protestataire et volatil. Si le FN monte, l'abstention progresse plus vite dans ces zones où la participation se révélait plus forte que dans les métropoles", note Bernard Sananes, directeur de l'institut Elabe qui ajoute : "La question de l'identité y est plus prégnante que dans les villes et même les banlieues". Nicolas Sarkozy s'adresserait-il à ces oubliés de la République en évoquant nos ancêtres les Gaulois ?
Le socialiste Arnaud Montebourg vend à ces populations le "made in France", sorte de mélange entre protectionnisme et patriotisme. Jean-Luc Mélenchon y célèbre le retour de l'État avec des nationalisations, la retraite à 60 ans, les petites exploitations agricoles. Dans cette France inquiète du lendemain, les promesses et les propositions rappellent furieusement une France d'hier. Est-elle encore possible ? Les habitants attendent des réponses concrètes. Elles pèseront lourd dans la présidentielle 2017. Pascal Jalabert
66 % des classes populaires vivent dans la "France périphérique" des petites et moyennes villes ainsi que des zones rurales, selon les calcul de Christophe Guilluy
Christophe Guilluy, Géographe, auteur de Le Crépuscule de la France d'en Haut (Flammarion)
"Les catégories populaires ne vient plus là où se crée la richesse"
Qui sont les nouvelles classes populaires ?
Il s'agit des personnes dont les ressources sont inférieures ou égales à 1 600 euros net par mois, le revenu médian français. Les "nouvelles classes populaires" sont composées des personnes qui, progressivement, ont quitté la classe moyenne à cause de la mondialisation. Il y a d'abord les ouvriers, puis les petits employés, les paysans, les petits retraités... Elles ont en commun de ne plus être dans une logique d'intégration économique et sociale, ni pour elles ni pour leurs enfants.
Cette catégorie de la population, majoritaire, se trouve dans la France périphérique : les petites villes, les villes moyennes et les zones rurales. Une nouvelle géographie sociale émerge. Pour la première fois de l'Histoire, les catégories populaires ne vivent plus là où se crée la richesse. Les métropoles, qui concentrent les classes supérieures, sont devenues des citadelles imprenables, dont les couches modestes sont exclues.
Pourquoi cette France périphérique a disparu du discours des principaux partis politiques ?
Rendre invisible la France populaire permettait de valider le modèle économique choisi par les dirigeants, celui de la mondialisation. Mettre l'accent sur la France des catégories populaires, démontre que le système fonctionne économiquement mais ne fait pas la société : il n'est pas socialement durable car il n'intègre pas économiquement les gens, et ne leur offre pas de perspectives.
Quelles sont les conséquences politiques ?
Il existe une rupture entre les classes populaires et les classes supérieures. À force de voir que, malgré leur vote, malgré les débats, les choses ne changent pas, les classes populaires s'éloignent de plus en plus de la représentation. Ce processus a commencé par l'électorat ouvrier : il a abandonné le vote à gauche pour l'abstention ou le FN, parti qui a compris qu'il fallait être une chambre d'écho des classes populaires de ces territoires car il n'y avait plus personne sur ce créneau. Puis les autres catégories à mesure qu'elles étaient laissées sur le bord de la mondialisation ont adopté les mêmes réflexes. Le vote n'a plus de valeur. La réaction outragée des élites aux résultats du référendum sur la constitution européenne en 2005 ou sur le Brexit conforte cette idée que la représentation politique n'est qu'un barnum qu'on ne peut plus influencer. Ce qui pousse encore les gens davantage à la rupture.
C'est l'expression d'une colère ?
On est aujourd'hui au-delà de la colère. La classe populaire s'organise comme une contre-société. L'éloignement de la représentation se traduit par une réappropriation des valeurs traditionnelles, qui peuvent être la religion en banlieue ou l'identité, le village, le territoire dans la France périphérique des petites et moyennes villes et des zones rurales. Une contre-société s'organise par le bas. Non pas par idéologie, mais par obligation. Ses fondamentaux sont une ascension sociale bloquée et une forme de sédentarisation imposée. Les gens organisent leurs vies par rapport à leurs contraintes matérielles qui ordonnent un minimum de solidarité. Par exemple, on va partager la voiture parce qu'on pas pas de quoi la payer.
Quelle peut être la réponse à cette rupture ?
L'erreur était de croire que l'on pouvait adopter le modèle économique mondialisé sans ses conséquences sociétales, un creusement des inégalités entre catégories populaires et supérieures. Il faudrait une révolution des classes dirigeantes qui au lieu de se dire qu'elles vont "éduquer" le peuple s'interrogent : quelle place pour ces territoires industriels et ruraux dans le modèle mondialisé. Propos recueillis par Élodie Bécu
le Progrès du jeudi 7 juillet 2016
RÉGIONS - AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. PARIS, DES MÉTROPOLES ET LE DÉSERT ?
C'est en aidant les plus forts, les métropoles, qu'on développera la France et tous ses territoires, dont ses campagnes, affirme France Stratégie dans un document publié aujourd'hui. Polémique assurée.
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argent manque ? Alors il faut choisir. Et le meilleur choix pour l'avenir de la France est d'"investir davantage de ressources publiques dans les grandes métropoles", en particulier Paris. C'est la conclusion d'un rapport de France Stratégie, chargé par le gouvernement de réfléchir à la "France 2017-2027".
L'État doit donc donner plus aux territoires qui ont déjà le plus. Et aux autres ? La prospérité des métropoles, en dopant l'économie et les rentrées fiscales, "bénéficierait in fine aux territoires défavorisés, par le système de protection sociale notamment", explique ce document intitulé "Dynamiques territoriales".
Métropole : "Il faut être là"
La préconisation s'appuie sur un constat : la France se développe à partir des ses métropoles. Les quinze plus grandes aires urbaines ont généré les trois-quarts de la croissance française entre 2000 et 2010.
La métropole parisienne abrite 18,8 % de la population française, mais perçoit plus de 30 % des salaires versés en France. Tandis que les zones rurales, qui abritent 12,4 % de la population, perçoivent seulement 6,4 % des salaires...
"La métropolisation est une force qu'on ne peut contrer. Un phénomène de concentration des compétences", explique le commissaire général Jean Pisani-Ferry. Il fait le parallèle avec San Francisco et la Silicon Valley : "Il faut être là".
Déclin significatif du Nord-Eest
Certaines métropoles apparaissent cependant moins dynamiques, comme Strasbourg, Rouen, Toulon... Pire, des territoires décrochent : les zones rurales, nous l'avons vu, et le Nord-Est. La faute au déclin industriel, mais pas seulement : l'Ile-de-France et Rhône-Alpes en ont également souffert, mais ont su rebondir.
En revanche, le Grand-Est, la Bourgogne-Franche-Comté, les Hauts-de-France, souffrent d'un "déclin économique significatif", souligne le document. Seules limites : l'emploi public, plus important en proportion, et les transferts sociaux qui bénéficient à leurs populations.
Égalité des chances
L'aménagement du territoire, rappelle France Stratégie, a longtemps visé à "redynamiser par l'investissement les territoires en déclin". C'est fini, "les évolutions économiques récentes amènent à repenser" cette politique. Il faut désormais "miser sur les métropoles, accepter d'investir là où la situation est déjà plus favorable qu'ailleurs".
Et que dire aux autres ? "À ceux qui n'ont pas eu la chance de naître dans la bonne localité, répond le commissaire général, il faut dire que leur destin n'est pas scellé". L'État, les régions et les métropoles doivent "garantir une égalité des chances entre les citoyens des différents territoires en France, et à l'intérieur des régions. Il faut développer des politiques plus spécifiques, plus territoriales".
Reste un risque, ainsi résumable : Paris, quelques métropoles, et le désert français... "C'est un risque, oui admet Jean Pisani-Ferry... L'économie moderne nous lance un considérable défi. C'est un fait, une réalité à prendre en compte". Francis Brochet
le Progrès du mardi 28 juin 2016
TERRITOIRES - RÉFORME. LES 13 RÉGIONS ONT DÉSORMAIS UN NOM
La Nouvelle Aquitaine, au sud ouest, complète depuis hier la carte de France des régions. Simplicité, géographie, histoire : les régions ont utilisé divers ressorts pour choisir leurs noms.
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est le dernier acte géographique de la réforme territoriale lancée en 2014. Les nouvelles régions ont toutes un nom, une préfecture. Comment ont-elles choisi ? Petit tour d'horizon du géographique, du Grand Est aux médiévaux Occitanie et Nouvelle Aquitaine.
Choix copié-collé
Les élus des deux régions n'ont pas vraiment pas torturé leurs méninges. Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté accolent les noms des anciennes régions. Cela permet aux anciennes régions de subsister... À travers les noms de leurs habitants, Bourguignons, Franc-Comtois, Auvergnats. Rhônalpins, restera peut-être utilisé par ceux qui n'habitent pas cette région car à Lyon, Saint-Etienne, en Savoie ou à Grenoble, personne n'utilise ce gentilé.
Choix géographique
Les élus du conseil régional issu de la fusion ont suivi les internautes qui ont voté à 75 % pour Grand-Est. Simple et efficace. À Paris, Lyon, Bordeaux où nous l'avons testée, l'appellation fonctionne déjà. Les habitants demeurent alsaciens, lorrains, champenois, ardennais (et même vosgiens) ce qui préserve les identités de tous. L'identification est moins spontanée pour les Hauts-de-France, nom imaginé sur la base de la carte de France, nom imaginé sur la base de la carte de France et d'une consultation via internet pour désigner l'association Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
Choix historique
Nouvelle Aquitaine, l'appellation approuvée hier par les élus du conseil régional regroupant "l'ancienne" Aquitaine, le Limousin et Poitou-Charentes, remonte le temps jusqu'au XIIe siècle. La duchesse d'Aliénor, première reine de France divorcée avait offert en seconde noce cette région... à l'Angleterre. Le Brexit aquitain n'avait eu lieu que trois siècles plus tard ! Leurs voisins s'appelleront Occitans. Née de la fusion de Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, à l'issue de vifs débat le 24 juin au Conseil régional, l'Occitanie a gagné son nom lors d'un vote sur internet avec une faible participation et malgré l'hostilité des professionnels du tourisme, troisième secteur d'activité de cet ensemble.
Choix évident
Les anciennes Haute et Basse Normandie avaient chois très tôt leur nouveau nom sans difficulté. Bretagne, Centre-Val de Loire (en 2014), Corse, Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'azur et Pays de la Loire ont gardé leurs noms. Les appellations doivent être validées en Conseil des ministres, puis par décret du Conseil d'État.
le Progrès du lundi 20 juin 2016
TERRITOIRE - FUSIONS. UN MILLIER DE COMMUNES EN MOINS EN FRANCE
Face à des difficultés croissantes de budget et d'organisation, plus de 400 projets de fusion de communes sont actuellement à l'étude, à l'initiative de leurs élus. En Haute-Savoie, la préfecture de département, Annecy, pèsera bientôt 122 000 habitants contre 54 000 aujourd'hui grâce à son rapprochement avec Annecy-le-Vieux, Cran-Gevrier, Meythet, Pringy et Seynod dont les conseils municipaux doivent simultanément se prononcer ce soir.
Se fondant également sur la loi de mars 2015, deux très grosses communes de la couronne parisienne viennent d'annoncer leur mariage : Issy-les-Moulineaux et Boulogne-Billancourt, au sud de la capitale, ne formeront plus qu'une entité à compter du 1er janvier 2018 ce qui fera d'elle la douzième commune de France avec 182 456 habitants.
Il y a peu, Cherbourg-en-Cotentin était parvenue à créer une commune de 83 785 âmes. Au total, 317 communes nouvelles ont été créées en France au 1er janvier 2016.
"C'est la première fois que les communes arrivent à se restructurer elles-mêmes sans décision de l'État, sans schéma étatique. C'est une réforme qui vient du terrain", note le député LR Jacques Pélissard, auteur de la loi de 2015. En deux ans, la France est passée de 36 700 à 35885 communes. Elle pourrait descendre sous la barre des 35 000. Fabrice Veysseyre-Redon
le Progrès du dimanche 12 juin 2016
PACIFIQUE NORD - TERRITOIRE FRANÇAIS
Clipperton, l'île oubliée de la République
Située à plus de 12 000 kilomètres de la métropole, l'île de Clipperton (appelée l'île de la Passion) est quasiment abandonnée par la France malgré son intérêt économique et écologique et sa position stratégique dans le Pacifique Nord. Un rapport du député UDI du Tarn, Phlilippe Folliot, sort ce territoire français de l'oubli.
C' |
est une île française du bout du monde qui n'intéressait pas grand monde. L'île de Clipperton sort de l'oubli à l'occasion de la remise d'un rapport qui préconise notamment d'y implanter une station scientifique internationale. Ce confetti qui se trouve à 1 300 km des côtes mexicaines et à 6 000 km de Tahiti est le seul territoire français du Pacifique Nord. Cet atoll de 7 km2, dont 1,7 km2 de terres émergées, est considéré par les scientifiques français de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) comme le plus isolé du monde. C'est aussi le seul lagon d'eau douce de la planète et l'un des rares lieux habitables actuellement inhabité.
Jusqu'à présent, un navire de la marine nationale française ne s'y rendait qu'une fois tous les deux ou trois ans, pour des raisons de restrictions budgétaires. Les marins se contentaient de hisser un drapeau tricolore neuf et de repeindre la stèle, histoire de réaffirmer la souveraineté française sur cette terre oubliée, située à plus de 12 000 kilomètres de la métropole.
Une île poubelle
L'intérêt soudain de la France pour l'île de Clipperton doit beaucoup au député UDI du Tarn, Philippe Folliot, qui s'y est rendu au printemps 2015 avec une mission scientifique. Le parlementaire était le premier élu de la République à y poser le pied. Il y a découvert une île poubelle, envahie par les déchets rejetés par l'océan. L'île est aussi soumise au pillage de ses ressources par des bateaux pratiquant une pêche intensive et aux trafiquants en tout genre, sur la route entre la Colombie et les États-Unis.
L'atoll héberge des millions de crabes, mais aussi 110 000 fous masqués, la plus importante communauté du monde de cet oiseau au bec jaune et à la face noire. Philippe Folliot a été très surpris que la France néglige ce territoire qui lui donne droit à une zone économique exclusive de 435 300 km2, plus vaste que celle de la métropole, dans une région du monde - le Pacifique Nord - stratégique sur le plan géopolitique et promise à un grand avenir économique.
Le député a écrit à François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls lui a confié une mission sur la valorisation scientifique de l'île. Dans son rapport rendu jeudi à la ministre des Outre-mer, Georges Paul-Langevin, Philippe Folliot avance plusieurs propositions pour redonner à Clipperton la place qu'elle mérite dans la République. Il propose notamment de la doter d'un véritable statut administratif et d'y installer une base scientifique internationale avec une dizaine de chercheurs. Ils pourraient y étudier par exemple les courants marins, la météo et le réchauffement climatique.
"Clipperton, seul exemple d'atoll corallien dans le Pacifique Est, est un des systèmes insulaires les moins perturbés du monde, ce qui lui confère un intérêt scientifique et patrimonial important", rappelait en 2005 l'explorateur Jean-Louis Étienne, qui y a effectué une mission scientifique de quatre mois consacrée notamment à dresser un inventaire de la biodiversité de l'île.
le Progrès du samedi 30 mai 2016
RÉGIONS - LE NOM "GRAND EST" VALIDÉ
La nouvelle région issue de la fusion de l'Alsace, de la Lorraine et de la Champagne-Ardenne s'appellera "Grand Est" ont décidé hier les élus régionaux, confirmant le choix des citoyens qui avaient à 75 % voté pour ce nom lors d'une consultation sur internet.