Franceinfo - le jeudi 22 août 2019 - mis à jour le 23.09.2019
Soupçonné, révoqué, recherché… La déchéance de Stéphane Sieczkowski-Samier, maire d'Hesdin, en quatre actes
Le Conseil des ministres a annoncé, mercredi, la révocation de Stéphane Sieczkowski-Samier, maire de cette commune du Pas-de-Calais. Il devient le cinquième maire à faire l'objet d'une telle décision dans l'histoire de la Ve République
Il n'avait que 22 ans lors de son élection en 2014 sous l'étiquette divers droite. Stéphane Sieczkowski-Samier, maire de la commune d'Hesdin, dans le Pas-de-Calais, surnommé le "Petit Sarko", a depuis défrayé la chronique. Visé par plusieurs enquêtes, notamment pour "détournement de fonds publics", "acquisition d'armes de troisième catégorie", "prise illégale d'intérêts" et "complicité de faux et usage de faux en écriture publique", le plus jeune maire de France a été destitué de ses fonctions, mercredi 21 août, sur décision du Conseil des ministres. L'occasion pour Franceinfo de revenir sur les dernières péripéties d'une épopée étonnante.
Acte 1 : déjà mis en examen en 2016, il est placé en garde à vue deux fois en cinq mois en 2019
En janvier 2019, Stéphane Sieczkowski-Samier et sa mère, Christiane Samier, élue municipale, sont interpellés et placés en garde à vue dans une enquête pour détournement de fonds publics. Ils sont soupçonnés d'avoir utilisé l'argent de la ville pour payer des restaurants, acheter des matériaux, des voitures, divers objets et surtout deux revolvers Soft Gomm. "Des armes d'entraînement qui ne sont utilisables par une collectivité ou des policiers municipaux qu'avec une autorisation de la préfecture. Or, ce n'était pas le cas", relate France 3 Hauts-de-France.
Quelques mois plus tard, le 9 mai, ils sont de nouveau placés en garde à vue pour "poursuite de l'ancienne procédure", selon son avocat Hervé Krych à France 3 Hauts-de-France. Les enquêteurs s'interrogent alors sur une somme correspondant au préjudice supposé du détournement et bloquée par le juge des libertés et de la détention sur un compte bancaire personnel de Stéphane Sieczkowski-Samier. Malgré cette procédure, la somme aurait disparu du compte, entraînant l'interpellation de l'élu pour "détournement d'objets saisis", ainsi que sa mère pour complicité. L'avocat du maire explique alors que "l'argent saisi est le fruit de ses économies et non de détournement de fonds publics".
Stéphane Sieczkowski-Samier et sa mère ont été par ailleurs mis en examen en 2016 pour "complicité de faux et usage de faux en écriture publique". Le maire est soupçonné d'avoir envoyé en avril 2016, en sous-préfecture, "une fausse délibération du conseil municipal qui décidait de confier la gestion des logements communaux à l'agence immobilière Orpi, appartenant... à sa mère", comme l'explique France 3 Hauts-de-France.
Acte 2 : son conseil municipal est menacé de dissolution
Face aux déboires judiciaires du jeune maire, la préfecture du Pas-de-Calais confirme avoir lancé, le 27 mai, une procédure de dissolution du conseil municipal d'Hesdin, qui doit être examinée en Conseil des ministres. Cette disposition figure dans le Code général des collectivités territoriales. Un préfet peut saisir le Conseil des ministres lorsque de graves dissensions au sein d'un conseil municipal perturbent son fonctionnement et mettent en péril la gestion de la commune.
Dans le cas d'Hesdin, le préfet du Pas-de-Calais précise que c'est le refus de voter le budget, en avril 2019, qui a motivé cette décision. La Chambre régionale des comptes a d'ailleurs publié un rapport accablant sur la gestion de l'argent municipal, en pointant "une situation très critique du pilotage de l’administration communale, devenu chaotique à bien des égards". En 2018, le budget n'avait pas non plus été voté.
Acte 3 : il est révoqué en Conseil des ministres
Une décision du Conseil des ministres, mercredi 21 août, officialise la révocation de Stéphane Sieczkowski-Samier de ses fonctions de maire d'Hesdin. Cette décision est confirmée par décret paru, jeudi matin, au Journal officiel.
La procédure avait été lancée en mai par la préfecture du Pas-de-Calais, en même temps que celle concernant la dissolution du conseil municipal. Cette décision implique l'inéligibilité de l'élu aux fonctions de maire et d'adjoint pendant un an. Mais, comme le rapporte France 3 Hauts-de-France, citant un communiqué de la préfecture du Pas-de-Calais, "le Conseil constitutionnel, l'ayant déclaré en mai 2018 inéligible jusqu’au 17 mai 2021, Monsieur Stéphane Sieczkowski-Samier ne peut se présenter à aucune élection avant cette date". La révocation ne concerne toutefois pas la qualité de conseiller municipal. Il s'agit du cinquième maire à faire l'objet d'une telle décision dans l'histoire de la Ve République.
Acte 4 : il disparaît et conteste sa révocation
Après l'annonce de la décision du Conseil des ministres, Stéphane Sieczkowski-Samier reste introuvable pendant près de 24 heures. Les gendarmes n'ayant pu lui remettre sa révocation en main propre, comme prévu par la loi, cela signifie… que le jeune maire n'est pas encore officiellement révoqué. Jeudi, coupant court aux conjectures, ce dernier publie sur Facebook une photo de lui aux Bahamas, selon la géolocalisation du cliché.
Joint par France 3 Hauts-de-France jeudi après-midi, son avocat, Hervé Krych, assure que son client "n'est pas aux Bahamas". S'il a posté cette photo, ce serait "pour montrer qu'il n'est pas déstabilisé, pas abattu par la situation comme certains pourraient le penser". L'avocat, qui s'était amusé de la cavale supposée du jeune maire, indique à France 3 vouloir "attaquer cette révocation" devant le Conseil d'Etat. Il ajoute disposer pour cela de "moyens juridiques suffisants". Dénonçant "une forme d'acharnement", il laisse aussi entendre qu'une conférence de presse est en préparation. Le feuilleton continue.
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