Franceinfo - le lundi 23 décembre 2019
Qui était le général algérien Ahmed Gaïd Salah ?
Agé de 79 ans, le très puissant chef d'état-major de l'armée algérienne, Ahmed Gaïd Salah, est mort d'une crise cardiaque le 23 décembre 2019, quatre jours à peine après l'investiture du nouveau chef de l'Etat
Le nouveau président algérien, Abdelmadjid Tebboune (à droite), salue le général Ahmed Gaïd Saleh au cours de la cérémonie de son investiture le 19 décembre 2019. (AFP - FAROUK BATICHE / DPA)
Ahmed Gaïd Salah est mort lundi 23 décembre. Il a été le visage du haut commandement militaire algérien, au cœur d'un système au fonctionnement opaque, depuis de longues années.
Né le 13 janvier 1940, Ahmed Gaïd Salah s'était engagé dès l'âge de 17 ans au sein de l'Armée de libération nationale (ALN) combattant le pouvoir colonial français, selon sa biographie officielle. Un passé dont les dirigeants algériens ont longtemps tiré leur légitimité.
Il a gravi "les échelons (de l'ALN ) en tant que soldat, officier puis commandant moudjahid" (combattant), rappelle le quotidien gouvernemental El Moudjahid.
"Nommé chef d’état-major de l’armée en 2004 par le président Bouteflika, il détient le record de longévité à ce poste. Il préférait manœuvrer dans l’ombre, en s’abritant derrière un pouvoir civil de façade", observe Le Monde. Pendant 15 ans, il fut un indéfectible soutien de l'ancien chef de l'Etat et l'un des personnages les plus puissants du cercle du pouvoir. "Jamais depuis Houari Boumediene, qui régna de 1965 à 1978, un seul homme n’avait concentré autant de pouvoirs", ajoute le journal français.
Comme un symbole, sa dernière apparition publique remontait au 19 décembre, lors de la cérémonie d'investiture du nouveau président Abdelmadjid Tebboune, élu une semaine plus tôt. Un scrutin que ce militaire de 79 ans avait imposé malgré l'opposition du mouvement populaire de contestation qui agite l'Algérie, le Hirak.
L'homme qui voyait l'Algérie comme "une grande caserne"
Après avoir arraché en avril la démission du président Abdelaziz Bouteflika, confronté à un mouvement populaire massif de contestation du régime, le général Gaïd Salah avait ensuite monopolisé la parole politique. Il était alors apparu comme l'homme fort de fait de l'Algérie, face à un pouvoir civil intérimaire muet.
Visage du haut commandement militaire, le pilier depuis l'indépendance en 1962 d'un régime algérien caractérisé par son opacité, il a durant plus de huit mois "suggéré" la marche à suivre au gouvernement. Tour à tour, il a félicité, admonesté ou mis en garde la contestation.
Dans l'armée, Gaïd Salah faisait "relativement consensus", étant "déjà âgé" et n'étant "pas un politique", commente Flavien Bourrat, chercheur à l'Institut de recherche stratégique de l'Ecole militaire à Paris. Mais il en allait autrement dans la rue. Un temps crédité d'avoir arraché le départ d'Abdelaziz Bouteflika, il avait été ensuite conspué pour son refus de mettre sur pied des institutions de transition réclamées par le Hirak. Mais aussi pour la multiplication des incarcérations de manifestants, militants et journalistes.
Pour Moussaab Hammoudi, chercheur doctorant à l'Ecole des Hautes études en Sciences sociales (EHESS) de Paris, Gaïd Salah n'était "pas un grand stratège" et agissait "en militaire brutal". Il voyait l'Algérie comme "une grande caserne. Pour lui, faire une concession c'est une faiblesse", estime le chercheur. Ii décrit un général qui agissait "par impulsion, sans réflexion, sans concertation".
Quelques grandes dates de la vie du général Ahmed Gaïd Salah
1940 : naissance dans la région de Batna (300 km au sud-est d'Alger).
1957 : il rejoint les rangs de l'Armée de libération nationale (ALN) qui combat l'armée coloniale française.
1962 : il intègre l'armée au moment de l'indépendance. Il était "diplômé de l’Académie militaire d’artillerie Vystrel (URSS)", rappelle le journal El Watan.
1994 : il devient chef d'état-major des Forces terrestres en pleine guerre civile entre l'armée et les maquis islamistes.
2004 : il est nommé par le président Abdelaziz Bouteflika à la tête de l'armée.
2013 : il devient vice-ministre de la Défense.
2 avril 2019 : il demande la mise à l'écart "immédiate" d'Abdelaziz Bouteflika, après avoir réclamé fin mars qu'il soit déclaré inapte ou qu'il quitte le pouvoir.
20 mai 2019 : il rejette les principales demandes du mouvement de contestation, à savoir le report de la présidentielle et le départ des figures du "système".
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