la Tribune du vendredi 29 août 2014
EUROPE - Les pays occidentaux accusent Moscou d'ingérence directe. L'Ukraine dénonce une "invasion" russe et réclame une aide militaire. Plusieurs milliers de soldats russes prêteraient main-forte aux séparatistes dans l'Est de l'Ukraine. Kiev demande à l'Union européenne une aide militaire d'envergure. Moscou minimise la situation.
Assiste-t-on à une nouvelle escalade dans l'Est de l'Ukraine, deux jours seulement après une poignée de mains hautement symbolique entre les présidents Porochenko et Poutine à Minsk ? Les espoirs de rapprochement et de discussion entre l'Ukraine et la Russie s'éloignent au fur et à mesure que la présence de soldats russes sur le sol ukrainien se précise.
Plusieurs combattants russes avaient déjà été capturés en début de semaine par l'armée ukrainienne, mais Kiev dénonce désormais une "invasion directe" et plus seulement une "incursion".
L'Ukraine a affirmé que des "troupes russes" avaient pris le contrôle de la ville frontalière stratégique de Novoazovsk, à 100 km au sud du bastion rebelle de Donetsk, où de violents affrontements ont eu lieu ces derniers jours. Plusieurs autres villages auraient été "capturés". Pour conforter Kiev dans ses craintes, le chef des séparatistes de Donetsk, Alexandre Zakhartchenko, a effectivement reconnu que "3 000 à 4 000" Russes servaient dans les rangs des insurgés. "Parmi nous se trouvent des soldats qui, plutôt que de passer leurs permissions sur les plages, nous ont rejoints, et qui combattent pour la liberté de leurs frères", a-t-il ajouté.
Devant la gravité de la situation, Petro Porochenko a annulé un déplacement officiel en Turquie. Une "aide militaire d'envergure" a été sollicitée auprès de l'Union européenne. La Lituanie et la Lettonie, évoquant une "invasion militaire évidente", ont demandé une réunion en urgence du Conseil de sécurité de l'ONU.
Les principaux dirigeants européens, dont François Hollande lors de la conférence des ambassadeurs, ont estimé "inacceptable" cette présence de soldats russes si elle était avérée. Le président français a demandé à la Russie de "respecter la souveraineté de l'Ukraine" et de "cesser son soutien aux séparatistes".
L'ambassadeur américain en Ukraine a accusé Moscou d'être "directement impliqué" dans la présence de ces combattants auprès des insurgés. Le Département d'Etat américain estime leur nombre à un millier et affirme par ailleurs que des mouvements massifs de blindés russes ont lieu cette semaine en provenance de Russie.
Ces derniers jours, la contre-offensive des séparatistes face à une armée ukrainienne à bout de souffle, qui peine à faire tourner les réservistes mobilisés et qui manque de moyens financiers, a été percutante. Est-elle liée à un soutien russe ? Moscou minimise la situation et parle d'une intrusion "accidentelle" de ses soldats en territoire ukrainien. Hier soir encore, le ministère russe de la Défense a déclaré que ces accusations n'avaient "aucun rapport avec la réalité".
Mais si les doutes et l'inquiétude se multiplient en Ukraine et dans les capitales occidentales, en Russie aussi plusieurs journaux indépendants commencent à exiger la vérité sur la participation russe au conflit. Plus sensible encore, les très respectés comités des mères de soldats supplient depuis mercredi Vladimir Poutine de leur avouer où sont leurs fils. Plusieurs centaines d'entre eux manqueraient à l'appel. Xavier Frère (avec AFP)
Ils ne seraient pour l'instant qu'une poignée de combattants français au sein de ce qu'ils décrivent, via les réseaux sociaux, comme "la Première brigade internationale du Donbass". Des volontaires "précurseurs". "Nous devons bien être conscients que se déroule à présent une troisième guerre mondiale", affirment-ils sur leur page Facebook ; "elle a commencé en Libye, s'est poursuivie en Syrie, et maintenant dans le Donbass. La Russie est l'un des rares pays... à lutter presque à lui seul contre le mondialisme international".
Ces quatre hommes, originaires de Paris, Toulouse et de Normandie, sont partis de France en juin, ont transité par la Russie et la Hongrie avant d'obtenir enfin un visa, et de rejoindre Donetsk il y a seulement quelques jours.
L'un des meneurs de cette "Unité continentale" est Victor Lenta, foulard sur la tête et bacchantes finement taillées, un ancien parachutiste du 3e RPIMA qui a combattu au Tchad, en Afghanistan et en Côte d'Ivoire. Mais il est aussi connu, à Toulouse, pour avoir animé les Jeunesses identitaires et pour un activisme violents. "Nous resterons en Ukraine le temps qu'il faudra, on attend une vingtaine de volontaires de l'Ouest pour monter la brigade", déclarait-il récemment à une télévision locale (pro-russe) qui a interviewé les quatre hommes en treillis, lourdement armés.
Leur motivation ? "Le combat contre l'impérialisme de l'OTAN et l'Union européenne pour défendre les populations russophones du Donbass". Un autre Français, Nicolas, est présenté comme un ancien chasseur alpin, ayant servi en Afghanistan. Sur cette vidéo, celui qui fait office de traducteur (en anglais), lunettes noires et tatouages, s'appelle Guillaume "le Normand", et serait licencié en histoire. Lui aussi sympathisant des milieux identitaires et nationaliste, il est passé par le groupuscule (aujourd'hui dissous) Troisième Voie et reste proche de son fondateur Serge Ayoub, si l'on en juge son activité sur Twitter. X.F.
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