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L'AIR DU TEMPS

la tribune du vendredi 9 janvier 2015

 

 

 

TERRORISME - Après l'attaque, jour de deuil et de traque. Après le carnage dans la rédaction du journal CHARLIE HEBDO, mercredi, les suspects poursuivis de Paris à la Picardie. Journée de recueil et (déjà) de premières fissures dans l'unité nationale, hier au lendemain du meurtrier attentat contre Charlie Hebdo dont le bilan reste à douze morts. La traque des deux tueurs s'est poursuivie en Picardie.

 

 

88 000 gendarmes et policiers sont mobilisés, sur l'ensemble du territoire, dans le cadre du plan Vigipirate, élevé au seuil maximum en Ile-de-France et Picardie. Dans cette région, un déploiement du Raid et du GIGN était en cours hier.

 

 

"J'aimerais juste aujourd'hui qu'on m'explique ce qu'il se passe en France. J'ai perdu un être cher et le sursaut des Français ne me le ramènera pas, donc pour le moment, je ne suis pas sensible à cela. La marche dimanche, je n'y serai pas". Jeannette Boughrab, Ex-ministre, compagne du dessinateur Stéphane Charbonnier dit Charb tué dans l'attaque.

 

 

La police les a cherchés toute la nuit à Reims et à Charleville-Mézières dans les Ardennes. Mais c'est à Villers-Cotterêts dans l'Aisne que les présumés assassins des dessinateurs de Charlie Hebdo ont - brutalement - réapparu, en braquant une station-service, hier matin, en rase campagne, au bord de la nationale 2. Le pompiste a formellement reconnu Saïd et Chérif Kouachi, identifiés dès mercredi grâce à une carte d'identité perdue dans la première voiture qu'ils ont utilisée.

 

 

Après le braquage, le duo est reparti en direction... de Paris, ce qui a provoqué un branle-bas de combat au ministère de l'Intérieur. Des kalachnikov et ce qui ressemble à un lance-roquettes ont été vus sur le siège arrière de la Clio grise dans laquelle ils circulaient. Les grands moyens ont été déployés pour les intercepter, en vain. Dans l'après-midi, la police et la gendarmerie cherchaient les deux fuyards entre Villers-Cotterêts et Crépy-en-Vallois (Oise), un secteur où la Clio grise a été retrouvée. Vide.

 

 

 

 

Une policière tuée à MONTROUGE

 

L'émotion a été d'autant plus forte, à l'annonce du braquage de la station essence, qu'un homme avait abattu tôt hier matin à Montrouge, au Sud de paris, un employé de la voirie et une stagiaire de la police municipale. Le premier a été grièvement blessé et la seconde, âgée de 20 ans, est décédée un peu plus tard des suite de ses blessures. Le tireur, habillé en noir comme les assassins de Charlie Hebdo, et qui selon des témoins, portait un gilet pare-balles, a disparu. Aucun lien n'a été décelé avec l'assaut de la veille mais il n'est pas impossible que l'exemple des tueurs de Paris ait été un élément déclencheur de son acte.

 

 

 

 

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Policière municipale tuée dans la fusillade

 

 

 

 

HOLLANDE A RECU SAKOZY

 

Ambiance tendue donc, pour cette journée de deuil national marquée par une minute de silence sur le coup de midi. La journée avait commencé par le retour à l'Elysée de Nicolas Sarkozy, président de l'UMP, que François Hollande avait convié à un entretien qui avait duré trois quarts d'heure. A la sorite, l'ancien président a évoqué, d'un ton grave, la "nécessaire unité nationale".

 

 

 

 

LE FN EXCLU DE LA MARCHE REPUBLICAINE

 

C'était le premier rendez-vous di président de la République avec les chefs de l'ensemble des partis politiques français. Des rendez-vous placés sous le signe de l'unanime fermeté face au terrorisme. Mais cette unanimité s'est rapidement fissurée, autour de la grande manifestation républicaine organisée dimanche. Le Parti socialiste s'est opposé à la présence du Front national tandis que l'UMP la réclamait. Marine Le Pen a dénoncé "l'exclusion d'un parti qui représente 25 % des Français", exclusion qui "transforme cette union nationale en une vaste escroquerie politicienne".

 

 

 

 

SECURITE : 88 000 PERSONNELS MOBILISES

 

Hier soir la traque continuait, à la fois au dus de Paris après le crime de Montrouge et au nord pour retrouver les tireurs de Charlie Hebdo. Le plan Vigipirate a été porté à son maximum en Picardie, comme il l'avait été mercredi en Ile-de-France. Le ministère de l'Intérieur a annoncé que plus de 88 000 personnes sont engagés sur l'ensemble du territoire. Hier soir cependant, le dispositif a été allégé dans l'Aisne ou aucun résultat n'a été obtenu.

 

 

 

 

NEUF GARDES A VUE

 

Bernard Cazeneuve a précisé hier soir que neuf personnes étaient en garde à vue, après les perquisitions réalisées à Reims, Gennevilliers (92) et Charleville-Messières. Dans cette ville des Ardennes, le plus jeune des trois suspects, Mourad Hamyd, 18 ans, beau-frère de Saïd et Chérif Kouachi, s'est rendu mercredi soir après avoir vu son nom circuler sur les réseaux sociaux. Des témoins affirment qu'il n'a pas pu participer à l'attaque, puisqu'il aurait été en classe dans son lycée à l'heure du carnage. Un alibi qui reste à vérifier, et qui ne lui a pas évité le placement en garde à vue, en compagnie de plusieurs membres de la famille.

 

 

 

 

ANGOISSE EN PICARDIE

 

La scène s'est répétée des dizaines de fois hier après-midi dans les rues de Gorcy, village de 360 âmes niché dans la forêt : par groupes de quatre ou cinq hommes, les policiers et gendarmes du Raid et du GIGN, habillés de lourds vêtements de protection noirs, prennent place autour d'un abri de jardin, d'un garage ou de tout autre recoin, désigné par un habitant anxieux. La traque minutieuse se fait dans le silence. Gendarmes et policiers communiquent entre eux par radio et par gestes. Ils sont parfois accompagnés d'un médecin.

 

 

 

"Flippant" disent les gens en voyant arriver les blindés"

 

A mesure que le soleil décline, les silhouettes des arbres se fondent dans le noir du ciel, et les opérations deviennent d'autant plus délicates. Policiers et gendarmes sortent les troches pour éclairer l'entrée d'un cimetière, puis un peu plus tard, passer au peigne fin les abords d'un étang de la forêt domaniale de Retz. Au milieu de ce déploiement de force, les habitants de la bourgade oscillent entre incrédulité et peur. "D'habitude, il n'y a pas plus calme comme village, même pas un lapin" dans les rues bordées de murets en pierre, témoigne Séverine, venue par précaution en voiture attendre sa fille à l'arrivée du car scolaire.

 

 

 

"C'est carrément flippant !", lance Carole, une toiletteuse canine qui a sillonné les environs toute la journée, de client en client, observant les hélicoptères survoler sa région. "Je ne comprends pas : les policiers sont habillés comme des robocops dans les rues, mais on nous laisse circuler sans problème. Imaginez qu'on se retrouve face à eux, qu'est-ce qu'on fait ?" s'interroge-t-elle. Dans la ville voisine de Crépy-en-Valois, de nombreux commerces, comme la supérette du coin, ont fermé durant toute la journée ou presque par peur de se retrouver nez-à-nez avec les personnes recherchées. "Est-ce qu'ils vont se suicider et emmener du monde au passage ?", demande Jonathan, 28 ans, employé dans une boutique de téléphonie mobile.

 

 

 

 

LE DJIHAD DES FRERES KOUACHI

 

Les hommes les plus recherchés de France sont deux frères, Saïd et Chérif Kouachi, âgés de 34 et 32 ans. Le parcours de l'aîné, Saïd, reste mystérieux. De lui, on sait peu de chose. C'était un homme discret, installé récemment à Reims avec sa femme, mère d'un enfant en bas âge, qui portait le voile intégral. Elle a été placée hier en garde à vue. Le cadet, Chérif, est en revanche bien connu des services antiterroristes français.

 

 

 

BANDE DU XIXe

 

Sa révélation pour l'islam radical remonte à 2003. Le jeune homme, français, orphelin de parents algériens, a grandi en foyer. A Paris, il est livreur de pizzas, arrondit ses fins de mois par des petits trafics et fréquente la mosquée Adda'wa dans le XIXe arrondissement. Comme le raconte Patricia Tourancheau dans Libération en 2005, il y rencontre Farid Benyettou, un petit prédicateur du quartier. Autour de lui, ils forment un petit groupe, la "filière irakienne" dite "des Buttes-Chaumont".

 

 

Ils sont une dizaine, ont fréquenté les mêmes collèges, les mêmes terrains de sport et la même mosquée. Quelques-uns sont morts en Irak, d'autres ont été arrêtés, d'autres, enfin, s'apprêtent à prendre la route. Chérif est de ceux-là. De petit délinquant, il bascule dans le terrorisme. Il prépare son départ pour l'Irak en courant dans le parc parisien des Buttes-Chaumont, en découvrant les rudiments du maniement de la kalachinkov. Mais il est interpellé juste avant de prendre l'avion, en 2005.

 

 

 

Jugé avec trois autres membres de la filière irakienne, il se défend en mettant en avant la pression du groupe et en affirmant son soulagement d'avoir été arrêté à temps par les forces de l'ordre. En 2010, la police retrouve sa trace dans une autre affaire liée au terrorisme. Il est cité dans le projet de tentative de faire évader de prison l'islamiste Smaïn Aït Ali Belkacem, ancien membre du Groupe islamique armé algérien (GIA), condamné en 2002 à la réclusion criminelle à perpétuité pour avoir commis l'attentat à la station RER Musée d'Orsay en octobre 1995 à Paris, qui avait fait 30 blessés. Chérif Kouachi est notamment soupçonné d'être proche de Djamal Beghal, une autre figure de l'islam radical français. Il l'a rencontré en prison où Djamel Beghal purgeait sa peine de dix ans l'incarcération pour la préparation d'attentats.

 

 

 

ISLAM RADICAL

 

Les enquêteurs, malgré les écoutes dont il fait l'objet, ne parviennent pas à impliquer directement Chérif Kouarchi, qui bénéficie d'un non-lieu. Cependant, les perquisitions chez lui confirment son ancrage dans l'islam radical. Depuis, l'homme s'est fait discret, au point de disparaître des radars et d'échapper à la vigilance policière. Même si la bande des Buttes-Chaumont fait à nouveau parler d'elle.

 

 

En 2013, en Tunisie, un des co-prévenus de Chérif Kouachi en 2005, Boubakeur El-Hakim, revendique l'assassinat de deux opposants aux islamistes en Tunisie, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Comment Chérif Kouachi s'est il fait oublier ? "Ce n'est pas parce que vous êtes connu, logé, que vous êtes surveillé en permanence" selon Eric Dénécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). "A un moment, la surveillance s'arrête, surtout si vous êtes assez malin pour vous tenir à carreau pendant un moment. Ce sont les trous inévitables dans les mailles du filet".

 

 

 



09/01/2015
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