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L'AIR DU TEMPS

le Progrès du jeudi 4 juin 2015

 

 

A travers cette article qui m'intéresse au plus au point, je n'ai qu'une remarque à formuler : "au lieu de se préoccuper de repentances, nous ne pouvons hélas pas refaire l'Histoire et nous ne sommes pas responsables de l'histoire passée, nous ferions bien (surtout les dirigeants de ce monde), par contre, de nous en inspirer pour que l'histoire ne se répète pas, surtout dans ses moments sombres. Je pense qu'il y a des leçons à tirer, et c'est au moins à cela que l'histoire passée peut servir".

 

 

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EDUCATION - L'histoire, un roman ou bien un récit national ? Forum d'historiens, hier, à la Sorbonne pour établir les nouveaux programmes. Le Conseil supérieur des programmes promet de réécrire les futurs programmes d'histoire d'ici septembre. Mais selon Najat Vallaud-Belkacem, l'histoire n'est pas "un roman national".

 

 

 

3 C'est le nombre d'heures hebdomadaires consacrées à l'histoire, à la géographie et à l'enseignement civique au collège, jusqu'en classe de 4e. En 3e, les horaires sont portés à 3 h 30, tandis qu'ils ne sont que de 2 h 30 en école primaire. Au lycée, les horaires varient selon les filières.

 

 

"Moins de chronologie en histoire ?. Elle est renforcée par rapport aux programmes de 2008. Ceux qui affirmaient que l'islam était enseigné obligatoirement mais pas la christianisme, ont été obligés de convenir qu'ils n'avaient pas lu les programmes. Les Lumières ? Elles seront étudiées !". Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes.

 

 

Déminage en cours ! La ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, a introduit un Forum d'historiens, hier à la Sorbonne, profitant de l'occasion pour redire que le gouvernement n'a rien contre l'histoire de France. "Je suis fière de vivre dans un pays où l'histoire est tellement prise au sérieux", a-t-elle lancé.

 

 

Mais il y a histoire... et histoire. Naja Vallaud-Belkacem ne veut plus de celle de grand-pap, exaltant une France idéalisée. Celle des "Jules", Michelet et Ferry qui a marqué trois Républiques (1871 à 1977). Pas question d'un "roman écrit par le pouvoir en place", il faut "une discipline scientifique".

 

 

 

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Les héros et la repentance

 

On est là au cœur de la polémique suscitée par la présentation de la réforme du collège et de la refonte des programmes. Polémique résumée par l'historien Pierre Nora : elle oppose "les partisans du roman national, c'est-à-dire l'histoire de France enseignée comme une fierté et une nécessité pour la formation civique, aux tenants d'une ouverture à une histoire déterminée par le poids de la mémoire coloniale".

 

 

Les historiens - Pierre Nora en tête - sont nombreux à rejeter ces deux visions de l'histoire, trop caricaturales à leurs yeux. "Il y a tant de victimes que l'on va être en peine de trouver des bourreaux", a relevé Patrice Gueniffrey, directeur de recherche à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS).

 

 

"Les nouveaux programmes portent une forme de culpabilité nationale qui fait la part belle à l'islam, aux traites négrières, à l'esclavage, et qui tend à réinterpréter l'ensemble du développement de l'Occident et de la France à travers le prisme du colonialisme et de ses crimes", souligne pour sa part Pierre Nora.

 

 

Michel Lussault, le président du Conseil supérieur des programmes (CSP), a admis que la rédaction de nouveaux programmes d'histoire comportait "certains défauts", par exemple le fait de rendre obligatoire l'enseignement de l'islam - qui pourrait être avancé de la 5e à la 6e -, et facultatif celui du Moyen-Age chrétien. "On va très sensiblement modifier leur écriture. Assumons, notre écriture n'était pas au niveau de ce que nous voulions expliquer", a-t-il promis.

 

 

Najat Vallaud-Belkacem reste toutefois inébranlable sur le fond : "La grandeur et inséparable de la bassesse qu'elle combat. Qu'est-ce que l'abolition de l'esclavage si l'on enseigne pas ce qu'était l'esclavage ? Qu'est-ce que la résistance si on n'enseigne pas ce qu'était la collaboration ?". Pour la ministre, l'histoire "doit raconter un récit national, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas de fiction".

 

 

"Faites-nous confiance"

 

Les historiens sont-ils pris entre deux feux politiques ? A droite, très majoritairement, on vante le "roman national", de Vercingétorix le Gaulois à Napoléon et De Gaulle. A gauche, on est plus ouvert à l'idée de la repentance, réclamée parfois à cor et à cri dans les collèges et les lycées de banlieue.

 

 

Bref, l'histoire est au moins autant un enjeu qu'une science. Depuis la première grande refonte des programmes d'histoire en 1977 par René Haby, ministre de Valéry Giscard d'Estaing, les polémiques se succèdent. Ce qui ne manque pas d'agacer professeurs et chercheurs : "Faites-nous confiance", a lancé un professeur de collège de Dordogne, jugeant "inimaginable que les profs fassent l'impasse sur Louis XIV".

 

 

Le forum de la Sorbonne était organisé parallèlement à une consultation des enseignants par le ministère. Les programmes du CP à la 3e seront ensuite amendés, puis finalisés en septembre pour entrée en vigueur à la rentrée 2016. Patrick Fluckiger

 

 

 

 

REPERES

 

 

L'épopée nationale cède le pas à une approche plus thématique. Seuls certains rois ont droit à un traitement "personnalisé" contrairement à d'autres figures comme Vercingétorix, Jeanne d'Arc, Richelieu, Napoléon et les grands hommes de la République. Les Béarnais regretteront l'absence d'Henri IV.

 

 

Charlemagne, roi et empereur

 

Fils de Pépin le Bref, il est bien connu pour avoir "inventé l'école", selon un air célèbre. Il fut surtout un guerrier féroce (contre les Saxons, les Lombards ou les Musulmans d'Espagne), sacré empereur d'Occident à Rome en 800.

 

 

Louis IX, le "roi chrétien"

 

L'image d'Epinal le place sous un chêne, à dispenser une bienveillante justice. Son règne, entre 1226 et 1270, fut surtout marqué par les croisades : septième (en Egypte), huitième (à Tunis) et la fin de la croisade contre les Albigeois, dans le sud ouest de la France où on n'enseigne pas son règne de la même façon. Il est canonisé peu de temps après sa mort (1297)

 

 

François 1er, protecteur des Arts

 

Souverain cultivé, chevalier complet des bords de Loire, il fut vainqueur à Marignan (1515), défait à Pavie (1525). Et surtout un défenseur de la langue française (ordonnance de Villers-Cotterêts), un grand bâtisseur et un mécène avisé.

 

 

 

Louis XIV, le roi Soleil

 

Son règne a été le plus long (1643-1715) et le plus glorieux. Né dans les troubles de la Fronde, il met la noblesse au pas, construit Versailles, promeut les arts français et mène une politique offensive en Europe.

 

 

Louis XVI, la Révolution

 

Arrivé au pouvoir en 1774, redevenu le citoyen "Louis Capet" par la grâce de la Révolution, il est guillotiné le 21 janvier 1793. La banque-route, ses hésitations face au torrent bleu-blanc-rouge eurent raison de ce roi épris... de serrurerie.

 

 

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Programmes : les points de la discorde

 

 

Retour sur les principaux points - réels ou fantasmés - qui font polémique.

 

 

 

Fin du récit national et de la frise

 

Organisés autour de grands thèmes - "Société, Eglise et pouvoir politique dans l'Occident chrétien - XIe-XVe siècles" ou "XVe-XVIIe siècles : nouveaux mondes, nouvelles idées" - les nouveaux programmes font la part belle à des enjeux sociaux et économiques ou culturels, aux dépens de "l'épopée nationale", et des ses grandes figures. En revanche les programmes respectent toujours la chronologie. "L'épine dorsale de l'histoire", selon Najat Vallaud-Belkacem.

 

 

Les repentances

 

Les programmes dresseraient un tableau sombre de l'histoire hexagonale, une sorte de "légende noire", succession de conflits de religion, d'esclavage et de colonialisme : "Les périodes glorieuses comme les périodes sombres servent à comprendre comme la France est devenue la France".

 

 

Les Lumières facultatives

 

Voltaire, Rousseau et Montesquieu à la trappe ? Certes le thème "L'Europe et le monde 17e et 19e" devient facultatif. Mais la Révolution française demeure obligatoire, et ne peut être étudiée sans ignorer ses fondements idéologiques. D'ailleurs, nul doute que la plupart des enseignants choisiront de garder l'étude des Lumières. Et les élèves y reviendront largement au lycée...

 

 

 

 

QUESTIONS à Franck SCHWARB

 

 

Membre de l'Association des professeurs d'histoire-géographie (APHG)

 

 

"Non au roman national, oui à l'Histoire"

 

 

Le Conseil supérieur des programmes va réécrire les programmes d'histoire. Qu'en attendez-vous ?

 

Vaste question ! On souffle actuellement d'une crise de confiance en nous-mêmes. L'enseignement de l'histoire est donc plus que jamais nécessaire pour dire qui on est, d'où on vient, aider les jeunes à se structurer au plan intellectuel et se positionner en tant que futurs citoyens. Il doit nous permettre de comprendre à quelle société nous appartenons, ce qu'est la France, et la France dans le monde dans ses dimensions particulières et universalistes.

 

 

 

C'est le "roman national" ?

 

Certainement pas. Je suis totalement opposé à cette notion. Le roman national renvoie à une France qui n'a jamais existé, et qui peut s'apparenter à une forme de dénigrement. Jean Moulin n'appartient pas au roman national, mais à l'histoire.

 

 

 

L'Histoire n'est-elle pas toujours écrite par les vainqueurs ?

 

Bien sûr. La tradition de l'historiographie française, depuis le XIXe, a été d'expliquer la spécificité de la nation, tout en étant ouvert au monde, en présentant différents points de vue, sans passer notre temps non plus à battre notre coulpe. Attention aux anachronismes ! Considérer Jules Ferry comme un colonialiste et un raciste, c'est oublier de resituer l'homme dans son époque. Les professeurs sont là pour donner une distance critique aux élèves par rapport à la complexité des choses qui exige de la nuance.

 

 

 

Faut-il revenir à la chronologie ?

 

Il faut donner des repères mais aussi laisser du temps pour expliquer les dates et les personnages.

 

 

 

Les programmes sont-ils trop lourds ?

 

Il appartient aux professeurs à faire la synthèse. La liberté pédagogique dont nous disposons permet de moduler le temps consacré à tel ou tel chapitre. Il n'y a aucun problème à conserver les Lumières ! Elles sont centrales. Elles ont fondé la France moderne. Elles marquent la naissance du pluralisme des opinions, l'exercice de la raison. Propos recueillis par Philippe Rivet

 

 

 

Histoire et politique ne font pas bon ménage

 

On appelle ça des lois mémorielles : depuis que le communiste Jean-Claude Gayssot a fait adopter en 1990 un texte qui punit ceux qui nient les crimes contre l'humanité des nazis - ce qui vise surtout la Shoah -, plusieurs minorités on réclamé, à leur tour, la protection du législateur. C'est ainsi qu'en 2001, Christiane Taubira réussit à faire voter une loi qui reconnaît la traite négrière transatlantique comme crime contre l'humanité et impose son enseignement scolaire. Retour de balancier en 2005 : la droite fait voter un texte qui exige que "les programmes scolaires reconnaissent le rôle positif de la présence française outre-mer".

 

 

 

La polémique est violente. Le conseil constitutionnel retoque cette loi. Tout comme il retoquera, en 2011, la pénalisation de la négation du génocide arménien, officiellement reconnu par la France quelques années auparavant. Les historiens s'opposent très majoritairement aux lois mémorielles, qui prônent selon eux une "histoire officielle" leur interdisant des recherches sereines.

 

 

 

Pour Pierre Nora, ces lois font de la France "l'avant-garde de la mauvaise conscience universelle". Une mission parlementaire menée par l'UMP Bernard Accoyer a préconisé, en 2009, la "fin" de tels textes.

 

 



05/06/2015
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