le Progrès du lundi 21 décembre 2015
METEOROLOGIE - Nous passerons Noël au balcon, et ce n'est pas bon... Un cap a été franchi ce mois-ci dans le processus de réchauffement climatique. Le mois de décembre est marqué par une remarquable vague de douceur, point d'orgue d'une année 2015 exceptionnellement chaude. Les prévisionnistes s'alarment.
16,3 degrés à Nancy, 22 degrés à Biarritz. Ces températures dignes d'un été indien ont été relevées par plus tard que la semaine dernière, en plein mois de décembre! Cela n'a échappé à personne. Une remarquable vague de douceur s'est installée sur la France ce mois-ci. Remarquable par sa durée et par son intensité : le mercure a ainsi atteint des valeurs records jeudi dernier dans plusieurs villes, notamment à Charleville-Mézières (15,6) et au Touquet (16,2°).
Et cela devrait se prolonger au moins jusqu'à Noël. Ceux qui rêvaient ainsi de finir l'année sous une cascade de flocons en sont pour leurs frais. Seul point positif : les économies de chauffage. Le mois de décembre reflète parfaitement l'année 2015, sans doute la plus chaude de l'histoire moderne. "La température moyenne à la surface du globe, en 2015, devrait être la plus élevée jamais constatée dans l'histoire moderne et franchira sans doute le seuil, aussi symbolique que significatif, que constitue un réchauffement de 1°C par rapport à l'époque préindustrielle", écrit l'Organisation Météorologique mondiale dans son rapport annuel.
Records cet été
Pendant les huit premiers mois de l'année, les températures ont été en permanence plus hautes que les normales de saison dans l'Hexagone, relève Météo France. Seul le mois de février a échappé à cette chaleur anormale. Le summum a été atteint cette été, avec deux épisodes caniculaires au mois de juillet. Les glaciers ont souffert, tout comme les plaines, asséchées par une pluviométrie très faible. Conséquence de ces températures : les violentes pluies du mois de septembre, dramatiques notamment dans le sud de la France.
La mer de glace - Chamonix
La deuxième année la plus chaude du continent africain
Cette dernière n'est pas la seule à avoir souffert cette année. Le rapport de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) est alarmant. En Inde, les 42°C ont été régulièrement dépassés. Et là aussi, les températures étouffantes ont été suivies de catastrophes météorologiques : les orages ont causé des dommages aux Etats-Unis, en Afrique australe, au Mexique, au Brésil ou encore au Burkina Faso. En six mois, la Chine a connu 35 épisodes de fortes pluies. Les inondations qui ont suivi ont touché 75 millions de personnes, les pertes économiques ont été estimées à 25 milliards de dollars.
Quant à la banquise, en Arctique et Antarctique, son étendue en 2015 a été la plus faible jamais observée. Seule bonne nouvelle s'il en est : 2015 n'a vu se former "que" 84 tempêtes sur la planète. La moyenne est de 85. Maigre consolation. La conclusion de l'OMM est sans appel : "Cette situation résulte des effets conjugués d'un puissant épisode El Nino et du réchauffement climatique causé par les activités humaines". Selon l'organisme, outre l'exceptionnelle 2015, les cinq années écoulées depuis 2011 représentent tout bonnement la période la plus chaude jamais enregistrée sur Terre. Dossier : Valentine Autruffe, Adrien Chipret et Florence Tricoire
"Le mois de décembre le plus doux depuis des siècles"
Stéphane Nedeljkovitch météorologue à Meteonews
Comment s'explique cette vague de douceur ?
Il y a une situation de blocage anticyclonique. De Moscou à Montréal, il y a les mêmes causes et les mêmes effets. Des anticyclones repoussent les masses d'air froid et surtout canalisent de l'air doux ou chaud en provenance des tropiques. On a eu des températures, fin novembre, qui laissaient présager un temps d'hiver, avec de la neige à basse altitude, mais tout cela a été vite balayé. A priori, ce sera le mois de décembre le plus doux depuis plusieurs siècles en France. Ce qui est exceptionnel, ce ne sont pas seulement les températures, mais aussi la durée de cette vague de douceur. Et il y a aussi très peu de pluie, c'est encore plus atypique.
Peut-on s'attendre à un effet boomerang ou est-ce que cela va se prolonger ?
Cette vague va durer jusqu'à Noël, et probablement jusqu'à la fin de l'année. Ensuite, il y aura des petits coups de froid et des rafraîchissements, c'est probable. Surtout en plaine, où il y aura des brouillards un peu plus fréquents, des gelées matinales. Mais même si on est dans une région du globe où les changements de temps peuvent être assez brutaux, on ne devrait pas avoir un hier froid cette année. Cela paraît très peu probable.
Doit-on s'attendre à des hivers de plus en plus doux à l'avenir ?
Oui, clairement. C'est ce qui est prévu par le scénario du réchauffement climatique et c'est ce que l'on constate depuis plusieurs années. Ca ne veut pas dire qu'il n'y aura pas, une fois ou deux, un hiver un peu plus neigeux. Mais on constate qu'il n'y a plus d'hivers très froids, et que le neige est de moins en moins fréquente. La moyenne monte, monte... Et quand on a des hivers plus frais que la normale, ça se joue à un ou deux degrés près, tandis que quand les températures sont plus douces, ça se joue à 3-4-5 degrés. C'est ça qui alerte.
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