le Progrès du samedi 22 octobre 2016
MIGRANTS - UN PLAN AMBITIEUX POUR VIDER LE BIDONVILLE
Calais : la "jungle" sera démantelée à partir de lundi
Le gouvernement a prévu 60 bus pour évacuer 3 000 migrants dès le premier jour avec un objectif de 7 250 départs en 3 jours. Les volontaires partiront dans 450 centres d'accueil répartis dans toute la France.
Le plus grand bidonville de France va disparaître du paysage. Le démantèlement de la "jungle" de Calais commercera lundi à 8 heures. La préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, a signé hier en fin d'après-midi l'arrêté qui donne le coup d'envoi de cette opération qualifiée "d'humanitaire" par Bernard Cazeneuve et Emmanuelle Cosse, les ministres de l'Intérieur et du Logement. Le gouvernement joue sa crédibilité à Calais, cette ville moyenne devenue un des points de crispation de la crise migratoire en Europe. Le succès ou l'échec de l'évacuation de la "jungle" seront des arguments politiques, à six mois de la présidentielle.
Comment va se dérouler le démantèlement ?
Le gouvernement a mobilisé des moyens très importants pour réussir l'opération. Un vaste hangar de 3 000 m2 situé à 300 m de la "jungle" permettra de répartir les migrants. Les volontaires au départ recevront des bracelets de couleur différente selon leur catégorie. Quatre files d'attente sont prévues pour les mineurs, les adultes, les familles, les femmes enceintes et les malades. Soixante bus sont réservés pour transporter les migrants vers un des 450 centres d'accueil et d'orientation (CAO), dans toute la France.
Combien de migrants partiront ?
La grande inconnue, c'est le nombre de migrants qui accepteront de monter dans les bus. Les Soudanais, qui sont les plus nombreux dans la "jungle", sont presque tous volontaires. Les Afghans - la deuxième nationalité - sont beaucoup moins enthousiastes. Comme la cinquantaine de Syriens présents à Calais, la plupart veulent aller en Angleterre, où ils ont plus de chance de trouver un travail et où ils ont souvent de la famille. Sur la seule journée de lundi, le gouvernement prévoit le départ de 3 000 personnes, puis 2 250 mardi et 2 000 mercredi. Cet objectif de 7 250 migrants en trois jours semble cependant optimiste : le démantèlement sera sans doute plus long.
Et les récalcitrants ?
Les migrants qui refuseront d'embarquer dans les bus à la fin de l'opération seront délogés par la force. La police a reçu des consignes pour les interpeller et les placer en rétention. D'après la Cimade, le gouvernement a rouvert trois centres de rétention et réservé 300 places au total pour les récalcitrants. Pourtant, un grand nombre d'entre eux ne pourront pas être expulsés car ils viennent de pays en guerre ou de dictatures. Le ministère de l'Intérieur a prévu 1 250 policiers et gendarmes lors du démantèlement. Ils surveilleront de près les 200 militants de No Border, tentés de l'empêcher.
Quand la "jungle" sera-t-elle rasée ?
La destruction des tentes et des baraques provisoires se fera au fur et à mesure que le bidonville sera vidé de ses habitants. Le "nettoyage" - c'est le terme utilisé par la préfecture - commencera mardi. Le démantèlement pourrait durer au moins une semaine, voire une quinzaine de jours. Une des missions de la police sera d'empêcher la reconstitution d'autres campements plus petits. C'est pourtant ce que craignent beaucoup de Calaisiens, qui se souviennent que la fermeture du centre de Sangatte en 2002 s'était soldée par la création de plusieurs "jungles" proches du centre-ville, démantelées puis reconstituées en 2009, puis en 2014. Le démantèlement du bidonville ne déplacera pas Calais sur la carte. Elle conservera son rôle d'aimant tant que l'Angleterre fera figure d'eldorado et que l'Europe n'arrivera pas à se mettre d'accord sur une politique migratoire commune. Luc Chaillot
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