la Tribune du lundi 29 septembre 2014
JAPON - Mortelle randonnée sur un volcan. Les systèmes d'alerte habituels n'ont pas anticipé cette éruption. Une éruption soudaine du mont Ontake a provoqué l'asphyxie mortelle d'une trentaine de randonneurs, et blessé des dizaines d'autres. Un "cas exceptionnel" selon le volcanologue Jacques-Marie Bardintzeff.
Le "réveil" samedi du mont Ontake, montagne sacrée à laquelle les Japonais vouent un aussi grand culte qu'au mont Fuji, a provoqué le décès de 31 randonneurs. Victimes d'arrêt "cardio-respiratoire" lié aux projections de cendres et à la fumée, ils ont été découverts par les secours et les militaires alors qu'ils tentaient d'échapper à la colère du volcan. De nombreuses autres personnes ont aussi été blessées, notamment par des projections de pierres. Les survivants racontaient avoir reçu " des pierre volcaniques comme des grêlons" de la taille de ballons de rugby et "être dans l'impossibilité de respirer et d'ouvrir les yeux".
L'éruption avait démarré samedi alors qu'environ 250 randonneurs se trouvaient sur les versants de ce "stratovolcan" d'une altitude de 3 067 m et situé à 200 km à l'ouest de Tokyo. Le panache de fumée est monté jusqu'à 11 km.
"C'est un volcan explosif, pas endormi mais assoupi", décrit le volcanologue Jacques-Marie Bardintzeff, revenu il y a seulement quelques jours d'Islande pour observer "l'éruption toujours en cours et de belle facture" du Bardarbunga. "Le magma est apparemment monté en quelques heures, et en rencontrant des poches d'eau, une surchauffe s'est produite jusqu'à transformer tout ça en cocotte-minute". Ce que l'on décrit dans le jargon comme un phénomène "phréato-magmatique ou hydro-volcanique".
Les refuges du Mont Ontake, recouverts de cendres, présentent un décor lunaire. Photo AFP
Logiquement, cette montée en pression laisse, selon ce spécialiste, "entre 24 et 72 heures", et il existe des signes avant-coureurs : microséismes, fumerolles. Des éléments qui poussent généralement les autorités à fermer l'accès au volcan. Cette fois, rien de tel, ce qui en fait un "cas assez exceptionnel", juge Jacques-Marie Bardintzeff. D'où l'effet de surprise, de panique générale sur les marcheurs, dont certains ont tenté de se protéger dans les refuges. Plusieurs dizaines ont été piégées. "Les gens étaient équipés comme des randonneurs sans masque à gaz, ni matériel de volcanologue ; c'est normal puisqu'on ne pouvait pas prévenir cette éruption".
Un tel "piège" volcanique est rare. Les derniers en date seraient survenus à l'Etna, le 17 avril 1987 (deux touristes avaient trouvé la mort et sept autres blessés) et en 1991 déjà au Japon, sur le mont Unzen, plus au sud : 43 personnes avaient péri dont les volcanologues Katia, Maurice Krafft et Harry Glicken.
Au Japon, cette "terre de volcans à la jonction de quatre plaques tectoniques", le mont Ontake, comme le mont Fuji légèrement plus élevé, est un endroit mythique, lieu de pèlerinages, y compris en famille. Son lac Ni no Ike, plus haut lac de montagne du Japon à 2 905 m, le rend encore plus attractif. Son accès devrait être interdit plusieurs mois, le temps que les volcanologues et sismologues japonais parmi les meilleurs au monde l'auscultent et tentent de comprendre ce soudain regain d'activité. Sa dernière éruption majeure datait de 1979. Xavier Frère
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