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La grogne sociale monte dans le pays, en raison de délestages électriques massifs depuis le 9 décembre
Des habitants de Cape Town en Afrique du Sud, victimes d'un délestage électrique le 18 mars 2019. (NIC BOTHMA / EPA)
Un chiffre résume la situation : la compagnie nationale d’électricité Eskom reconnaît ne pouvoir faire face qu’à 80% de la demande. Vous avez compris : il en manque 20%. Donc que fait-elle ? Elle coupe le courant, le plus souvent dans la journée, quand il fait jour, entre 6h du matin et 20h le soir (c’est l’été là-bas). C’est le principe du "délestage". Et depuis le lundi 9 décembre, tout le monde est touché en Afrique du Sud, à tour de rôle, sur un principe tournant. Les particuliers, les entreprises, les écoles, personne n’est épargné dans ce pays de 57 millions d’habitants, pourtant l’un des trois plus riches du continent africain, avec le Nigeria et l’Égypte. La journée du mardi 10 décembre a été la pire. Mais ça devrait durer au moins jusqu’à la fin de la semaine. Cette pratique des délestages électriques est assez courante en Afrique du Sud depuis une dizaine d’années, mais ça n’avait jamais atteint pareille ampleur.
Il y a plusieurs explications à cette situation. L’entreprise, qui fournit plus de 90% de l’électricité dans le pays, invoque une raison conjoncturelle : les inondations provoquées par des pluies violentes ont mis hors service plusieurs centrales. Il est aussi question de sabotage par des salariés de l’entreprise, hypothèse avancée par le président sud-africain lui-même, Cyril Ramaphosa. Mais l’explication principale, c’est surtout l’état de délabrement des centrales électriques du pays, à 90% des centrales à charbon. Ces centrales ont en moyenne 37 ans, un déficit majeur d’entretien et d’investissement. L’entreprise Eskom est criblée de dettes : plus de 25 milliards d’euros d’endettement cumulé, c’est colossal.
Hier, le président Ramophosa est rentré précipitamment d’Égypte où il était en voyage officiel. Il a convoqué une réunion de crise avec les dirigeants de l’entreprise électrique. Et il a décidé, purement et simplement, d’interdire les congés à tous les salariés d’Eskom, pendant cette période de fin d’année. Parce que le risque, c’est celui de l’explosion sociale, au moment où les Sud-Africains se préparent aux vacances estivales, un mois d’arrêt entre mi-décembre et mi-janvier. "Je ne veux pas de coupures pendant les vacances", a martelé le président.
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À court terme, Eskom pourrait acheter de l’électricité à de petites compagnies privées. Mais il faudrait surtout renouveler tout le parc de production et ça va prendre des dizaines d’années. En plus, le plan récemment adopté va en sens inverse de l’Histoire sur l’enjeu climatique : il vise à construire à nouveau des centrales à charbon. Pour ne rien arranger, les deux nouvelles centrales qui sont déjà en construction connaissent de gros retards de livraison, en raison probablement de la corruption qui gangrène le pays. Le souci, c’est que l’Afrique du Sud n’a pas le temps d’attendre : ces coupures d’électricité massives ont en effet des conséquences sur toute la chaîne de production économique. Et le pays n’a pas besoin de ça, avec un chômage de 30% et une population très jeune (35% des Sud-Africains ont moins de 20 ans). On comprend pourquoi le président Ramaphosa est rentré hâtivement au pays.
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