la tribune du mercredi 18 février 2015
AFRIQUE - Libye : l'Egypte monte au front. Frappes aériennes depuis lundi contre l'Etat islamique. Le Conseil de sécurité de l'ONU se réunit aujourd'hui sur la situation en Libye. LEgypte, et son homme fort, le général al-Sissi, souhaitent fédérer une coalition internationale contre Daech.
Continuer "à combattre tous les jours pour une Egypte débarrassée du terrorisme". Voilà les termes qu'employait déjà le général Fattah Al-Sissi lors de l'élection présidentielle en 2014. Pour juguler le terrorisme à l'intérieur, il faut aussi le circonscrire à l'extérieur, c'est-à-dire dans les pays limitrophes, à commencer par la Libye.
Hier, le président égyptien redevenu chef de guerre, a donc prôné l'adoption d'une résolution par le Conseil de sécurité de l'Onu, qui se réunit aujourd'hui. Objectif : obtenir le feu vert pour l'intervention d'une coalition contre les extrémistes islamiques de Daech en Libye.
"Il n'y a pas d'autre choix", a martelé le chef d'Etat égyptien, dont l'armée pilonne depuis lundi les positions des djihadistes. Le massacre de 21 coptes chrétiens égyptiens le week-end dernier a sans doute accéléré l'option militaire, mais le nouveau raïs tient aussi à montrer aux puissances occidentales qu'il est devenu incontournable dans la région. Qu'il ne sera pas seulement un pion dans la recherche de solution au chaos libyen, mais bien un moteur, voire un éclaireur.
Dans les pas de Nasser
"La mission n'a pas été achevée par nos amis européens, nous avons abandonné le peuple libyen prisonnier de milices islamistes", soutient ainsi Al-Sissi, qui appelle les djihadistes à "remettre leurs armes et travailler dans le cadre d'une action civile".
Dans le chaos libyen, les islamistes et les Frères musulmans sont soutenus par la Qatar et la Turquie. L'Egypte, elle, comme l'Algérie, l'Arabie saoudite, appuie le général Khalifa Haftar réapparu en Libye à la faveur du Printemps arabe et formé par les Américains.
Etrange patchwork : les Etats-Unis avaient gelé, début 2014, leurs aides au pays des pyramides, le plus peuplé du monde arabe, et montré une grande frilosité sur l'arrivée au pouvoir du général égyptien. En riposte, Al-Sissi avait même accusé l'administration Obama de trahir l'Egypte : "Vous avez tourné le dos aux Egyptiens et ils ne l'oublieront jamais !".
Changement de stratégie aujourd'hui devant la menace de contagion terroriste menée notamment par Daech. Sur cet échiquier, Al-Sissi tente aussi d'asseoir une légitimité internationale, d'enfiler les bottes de Gamal Abdel Nasser, l'ancien président nationaliste de 1956 à 1970, dont il est un fervent admirateur.
Gamal Abdel Nasser Fattah Al-Sissi
Les coptes apprécient ce retour d'un Etat plus fort que la religion dominante. Les milieux d'affaires et... les voyageurs l'attendent. "Il a dans l'Histoire de grandes situations qui avaient attendu en vain leur héros", répétait souvent Nasser. Al-Sissi sera-t-il ce "héros" que le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord attendent ? Xavier Frère
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