Le progrès du dimanche 19 avril 2015
EUROPE - Andreï Kourkov, arrêté par la guerre. Rencontre avec le plus célèbre des écrivains ukrainiens. Poutine veut la désintégration de l'Europe, afin d'avoir les mains libres en Ukraine et ailleurs, affirme l'auteur du Pingouin, de passage à Paris pour la traduction d'un de ses romans.
Andreï Kourkov est en panne d'écriture. Son dernier roman en chantier depuis plus d'un an... "C'est la première fois que ça m'arrive. J'ai été arrêté, on peut dire, par l'histoire de l'Ukraine", nous déclare l'écrivain, au sous-sol de sa maison d'édition parisienne, Liana Levi. Cela dans un excellent français avec une pointe d'accent russe, et un sourire venant contredire la gravité du propos.
Le comique du désespoir
Kourkov en panne d'écriture, ça n'est pas rien. Depuis le succès planétaire de son premier romain, Le Pingouin, en 2000, il n'a cessé de publier. Toujours dans la même veine, que l'on retrouve dans le concert posthume de Jimi Hendrix, paru en 2012, mais qui vient d'être traduit : un sens aigu du comique dans les situations les plus désespérées, avec une pointe de poésie lunaire.
Poutine veut "désintégrer l'UE"
La guerre l'a arrêté. Un conflit ouvert à l'automne 2013 par des manifestations pro-européennes place Maïdan à Kiev, suivies d'une intervention de la Russie en Crimée, puis d'une guerre civile dans l'Est du pays. Il en a fait la chronique dans un Journal de Maïdan publié l'an dernier : "La réalité reste beaucoup plus importante que la fiction", nous dit-il aujourd'hui.
Ce livre et ses prises de position lui on valu la haine des pro-russes. Un comble pour ce Russe d'origine, qui ne partage aucun excès nationalistes ukrainiens. Mais il a choisi son camp, contre Vladimir Poutine : "Il essaie de créer une version moderne du vieux système soviétique, avec un parti unique, Russie Unie, dont tous les fonctionnaires doivent être membres".
Andreï Kourkov est pour la liberté, avant d'être pour l'Ukraine. Et il s'irrite de la longue inaction de l'Europe : "Les Européens, je crois, considèrent la guerre comme une épidémie. L'important est que la maladie n'atteigne pas l'Europe, qu'elle reste dans le pays. Et on attend que tous soient morts ou fatigués de combattre..." L'objectif de Poutine est selon lui de "désintégrer l'Union européenne", afin d'avoir les mains libres. Pour preuve son appui à des partis aussi différents que le Front National et Syriza. Francis Brochet
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