le Progrès du jeudi 15 septembre 2016
CRISE SOCIALE - ALSTOM : QUI SAVAIT QUOI ?
La polémique fait rage sur les responsabilités dans la crise d'Alstom-Belfort entre dirigeants politiques, direction de l'entreprise, et même la SNCF, appelée à la rescousse.
La journée promet d'être lourde à Belfort. L'inter-syndicale d'Alstom y appelle à transformer la mobilisation prévue sur la loi Travail en grande protestation contre la fermeture annoncée du site : "Il faut qu'on fasse peur à la direction. Il faut qu'Henri Poupart-Lafarge (PDG d'Alstom), dans son bureau, entende un peu ce qu'il se passe ici", a lancé Olivier Kohler (CFDT).
Ces mêmes syndicats appellent à une grève dans l'ensemble du groupe, le 27 septembre. Et le maire de Belfort Damien Meslot (LR) invite à une opération "ville morte" le samedi 24, demandant aux commerçants de baisser leur rideau.
La mobilisation s'organise, alors que le gouvernement s'est donné dix jours pour proposer des pistes de solution. En attendant, la polémique fait rage : qui savait quoi ? Qui a fait, ou n'a pas fait, ce qu'il fallait ? Une sorte de terrible et pitoyable jeu de mistigri sur les responsabilités de chacun dans le désastre annoncé.
Joseph Stiglitz prix Nobel d'économie
"Alstom, symbole de la mondialisation"
Que pensez-vous de l'affaire Alstom-Belfort ?
Deux mouvements nés de la mondialisation sont à l'oeuvre en Europe et dans tous les pays développés : un glissement des industries manufacturières vers les services, et un glissement de la localisation des usines de l'Europe et les États-Unis vers la Chine. Ce sont des forces très puissantes, qui exigent des efforts d'adaptation.
Le problème est que l'euro rend plus difficiles les ajustements nécessaires face à un choc comme la crise de 2008, ou face à des divergences de compétitivité. Et la fermeture d'Alstom à Belfort représente comme un résumé des ces évolutions. Cela fait peu d'emplois, si l'on compare aux emplois créés dans l'économie numérique, mais ils font figure de symbole. L'Europe et les États-Unis doivent donc mener des restructurations difficiles pour sortir de l'industrie vers les services, avec une partie des salariés qui ne pourront pas être facilement reconvertis.
C'est pourquoi il nous faut davantage d'État-providence, contrairement à ce que disent les néolibéraux, et mener des politiques actives en faveur de l'industrie et de l'emploi, avec l'objectif de tendre au plein-emploi. Sinon, la transition sera encore plus dure, et les batailles seront acharnées pour chaque emploi perdu, car les gens sauront que perdre son emploi, c'est devenir chômeur pour le reste de sa vie, et non pas avoir l'opportunité de se reconvertir dans un secteur plus dynamique. Recueilli par Francis Brochet
À lire : "Leuro. Comment la monnaie unique menace l'avenir de l'Europe" (LLL).
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