le Progrès du jeudi 28 mai 2015
SYRIE - Ils voient les obus pleuvoir sur ALEP. Témoignage de trois musulmans sunnites de passage en France. Trois Syrie (sunnites) de l'opposition ont entamé hier à Lyon une visite d'une semaine en France à l'invitation du maire de Metz, Dominique Gros. Ils doivent être reçu aujourd'hui à Paris.
Une nuit blanche, suivie d'une longue attente à leur arrivée à l'aéroport à Lyon. "La police française les a retenus deux heures pour vérifications", rapporte Irène Arnulf-Goldstein, représentante du collectif de associations civiles syriennes (CODSsy). Les trois Syriens sont épuisés par leur voyage mais s'efforcent de garder le sourire, presque soulagés de pouvoir témoigner, en France, de leur quotidien à Alep, une ville assiégées et quasi inaccessible aux journalistes.
"Sachez que nous avons la volonté de vivre et de continuer à nous battre", insiste le Dr Aref Razouk, dont les propos en arabe sont traduits par une Franco-Syrienne. Dans une salle de notre rédaction, ce chirurgien, président du conseil médical d'Alep, s'est assis à côté d'Alaa Aldee Jabri, ingénieur membre du comité civil d'Alep, et d'Alaa Ahmed, pharmacien dans l'humanitaire. Tous, musulmans sunnites, sont issus de l'est de la vile, où ont été mises en place en 2013 des institutions "élues démocratiquement et apolitiques".
Opposants au régime de Bashar el-Assad comme à l'Etat islamique, ces partisans d'un "Etat démocratique" se retrouvent, comme leurs coreligionnaires, la cible de ces deux armée antagonistes : "Nous sommes face à un grand défi. Des zones d'Alep se donnent à Daesh. Et le régime faiblissant de Bashar el-Assad se prépare à utiliser l'Etat islamique pour annihiler l'opposition", redoute Aref Razouk.
Les groupes armés rebelles ont eu beau "se fédérer en cellules de combat", cela n'empêche nullement le déluge de bombes sur l'est de la ville, incessant depuis 2013. Alaa Aldee Jabri ouvre son ordinateur portable pour lancer une vidéo "filmée deux jours plus tôt". On y voit, au milieu de bâtiments détruits, des images difficilement soutenables de corps de nouveaux nés écrasés sous les décombres.
Des images difficilement soutenables
"Cela vient de se passer à Alep", dit Alaa Aldee Jabri. D'après lui, c'est l'armée syrienne qui est en cause. "Tous les jours, des hélicoptères du régime lâchent sur les civils des barils remplis de TNT et de morceaux de métal. Les habitations, les hôpitaux et les écoles sont visés", reprend le Dr Aref Razouk, qui tient même une comptabilité de ces attaques : il a recensé 170 lâchers de barils sur Alep, rien qu'au mois d'avril. Le médecin dénonce aussi l'usage par l'armée syrienne "d'armes chimiques, en particulier au chlore" et exprime "une très forte crainte" pour l'avenir : "La population n'a plus les moyens de fuir et nous n'avons plus les moyens suffisants pour la soigner.
Et puis, imaginez un père de famille qui voit son enfant déchiqueté par une bombe : c'est ce que la population vit tous les jours et cela ne peut que conduire à une radicalisation". Avec ses amis, il espère que les Français écouteront son message : "Pour nous, la France est le pays de la Révolution et des droits de l'Homme. Aidez-nous à stopper ces massacres !" Nicolas Ballet
Reçus à l'Assemblée
A Lyon, la délégation syrienne a rencontré mercredi des élus du conseil régional et de la Métropole (ex-Grand Lyon). Elle espère relancer un accord de coopération décentralisée avec la Métropole, suspendu depuis 2011 en raison de la guerre Une charte d'amitié avait été signée il y a deux ans entre le comité civil d'Alep et la ville de Mets. La délégation syrienne sera reçue ce jeudi par Elisabeth Guigou et des membres de la commission des Affaires étrangères et de la Défense, à 11 h 30 à l'Assemblée, puis à 16 h 30 au ministère des Affaires étrangères avec l'Ambassadeur de France pour la Syrie.
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