www.l-air-du-temps-de-chantal.com

L'AIR DU TEMPS

le Progrès du lundi 16 novembre 2015

 

 

 

Soupçon d'espoir pour la Syrie. Le G20 réuni hier et aujourd'hui à Antalya, en Turquie. Les présidents russe et américain ont amorcé hier un dégel de leur relations, ouvrant une perspective d'accord sur la guerre en Syrie, en désignant l'EI comme ennemi commun.

 

 

 

 

C'est par une minute de silence que les dirigeants des 20 plus grandes puissances mondiales ont commencé hier leurs travaux, dans la station balnéaire turque d'Antalya. Une minute en mémoire des victimes des attentats de Paris, bien sûr. Mais aussi de ceux d'Ankara, qui avaient causé plus de 100 morts le 10 octobre, et avaient été attribués à Daech.

 

 

 

 

Ce G20 a également été précédé par un aparté surprise d'une demi-heure, entre Barack Obama et Vladimir Poutine. Les présidents américain et russe, qui depuis des mois étalent leurs divergences sur la Syrie, sont tombés d'accord pour soutenir un processus de transition politique dans le pays. Elaboré samedi lors d'un sommet à Vienne, ce processus prévoit des "négociations sous l'égide de l'ONU entre l'opposition syrienne et le régime, et un cessez-le-feu", selon un responsable américain. Un gouvernement de transition serait formé dans les six mois, et des élections organisées d'ici à dix-huit mois. Nombre d'obstacles restent à franchir, notamment le sort à réserver au président syrien Bachar al-Assad.

 

 

 

 

"Nous avons des objectifs stratégiques liés à la lutte contre l'EI, et ceux-ci sont proches l'un de l'autre, mais il reste toujours des divergences sur la tactique", a commenté un responsable russe. Cela tend à confirmer que les attentats de Paris ont facilité l'accord, confirmant Daech dans le rôle d'ennemi n°1 commun à tous, et permettant au dictateur syrien d'apparaître en moindre mal. Le paradoxe serait que les attentats de Paris aboutissent ainsi à mettre en difficulté la diplomatie française, qui a toujours posé le départ de Bachar al-Assad en condition préalable à toute discussion. Le président turc et hôte du sommet Recep Tayyip Erdogan a donc pu promettre au nom de tous une réponse "très forte" contre Daech.

 

 

 

 

Polémique sur les migrants

 

"Il n'y a pas lieu de revoir dans leur ensemble les politiques européennes en matière de réfugiés", a martelé hier Jean-Claude Juncker. Le président de la Commission répondait aux critiques qui prennent appui sur les attentats de Paris pour stopper l'accueil des migrants dans l'Union. Elles pointent en particulier la découverte, sur l'un des assaillants du Bataclan, d'un passeport syrien appartenant à un migrant entré dans l'Union par l'île grecque de Leros. "Tous les réfugiés ne sont pas des terroristes de l'EI. Mais croire qu'il n'y a aucun combattant parmi les réfugiés est naïf", a ainsi attaqué Markus Söder, dirigeant des conservateurs catholiques bavarois de la CSU, opposés à la politique d'accueil de la chancelière allemande. Le sujet sera sans doute au menu de la réunion des ministères européens de l'Intérieur, convoquée vendredi.

 

 

 

 

 

Le fief de l'EI à Raqa bombardé

 

Dix chasseurs-bombardiers français ont largué 20 bombes hier sur le fief de l'EI à Raqa (nord de la Syrie), détruisant un poste de commandement et un camp d'entraînement. Le premier objectif détruit était utilisé par Daech comme poste de commandement, centre de recrutement djihadiste et dépôt d'armes et de munitions. Le deuxième objectif abritait un camp d'entraînement terroriste.

 

 

 

Douze appareils, dont dix chasseurs, ont été engagés simultanément à partir des Emirats arabes unis et de la Jordanie et on largué 20 bombes. "Planifiée sur des sites préalablement identifiés lors des missions de reconnaissance réalisées par la France, cette opération a été conduite en coordination avec les forces américaines", précise le ministère. L'EI a revendiqué la vague d'attentats vendredi soir à Paris. François Hollande, avait averti que son pays serait "impitoyable" sur tous les terrains, "intérieur comme extérieur".

 

 

 

 

QUESTIONS à François HEISBOURG

 

 

 

Fondation pour la recherche stratégique

 

 

 

"Nous n'en sommes qu'au début de la campagne de Daech"

 

 

 

 

"Nous devons nous préparer psychologiquement à des actes d'hyper-terrorisme", écriviez-vous dans votre livre, Secrètes histoires (Stock). Nous y sommes ?

 

Je le crains, malheureusement, et c'est durable. C'est une campagne, qui fait penser à celles de l'IRA en Irlande et au Royaume-Uni, de l'ETA en Espagne, ou d'Al-Qaïda : ces séquences terroristes ont duré quinze ans, trente ans... On n'est donc qu'au début de la campagne Daech, dont la capacité à frapper au-delà des frontières de la Syrie et de l'Irak date d'à peine deux ans.

 

 

 

 

Cette campagne Daech a des caractéristiques particulières ?

 

Oui : Al-Qaïda disait vouloir frapper la France à cause de l'interdiction du voile, donc pour ce que nous étions, avec des motivations religieuses et idéologiques. Cet aspect existe aussi chez Daech, dans la revendication contre Paris, "capitale des abominations et de la perversion". Mais Daech nous frappe aussi pour ce que nous faisons. Il y a chez Daech une dimension politique et stratégique : il se comporte comme un proto-Etat, une entité à la recherche du pouvoir.

 

 

 

 

Pourquoi la France ? Elle n'est pas seule à intervenir en Syrie...

 

Bien sûr, et elle n'est pas la seule frappée. Il y a eu l'attentat contre l'avion russe, la prise d'otages sanglante en Australie (en décembre 2014), l'attentat de Beyrouth contre le Hezbollah...

 

 

 

 

La France doit-elle, en Syrie, se ranger avec Bachar al-Assad contre Daech ?

 

Beaucoup le réclament, comme Madame Le Pen et certains Républicains... Mais se mettre avec Bachar, c'est se mettre contre les sunnites, qui représentent 75 % de la population syrienne, et c'est faire exactement ce que Daech souhaite que nous fassions.

 

 

 

 

La tension américano-russe, palpable au G20, favorise-t-elle le terrorisme ?

 

Elle n'aide pas  la combattre, c'est certain. Mais la tension la plus grave est celle entre l'Iran et l'Arabie saoudite, entre la grande puissance chiite qui soutient le régime de Damas et le Hezbollah, et la puissance sunnite en guerre larvée contre l'Iran, et en concurrence avec Daech : Daech, c'est l'Arabie sans pouvoir, avec l'objectif de ravir la Mecque et Médine aux wahhabites saoudiens, mais avec la même filiation idéologique et religieuse. C'est cette rivalité Iran-Arabie qui empêche tout règlement politique en Syrie, plus sûrement que les divergences entre le président américain et le président russe. Recueilli par Francis Brochet

 



16/11/2015
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 59 autres membres