le Progrès du mardi 27 décembre 2016
CLIMAT - 2016 A ENCHAÎNÉ LES TEMPÉRATURES PLUS ÉLEVÉES QUE LA MOYENNE
Les records de chaleur ont été encore battus
L'atmosphère de la planète a dépassé cette année de 1,2 degré celle de la fin du XIXe siècle avec des températures très élevées. La lutte contre le réchauffement climatique devient de plus en plus urgente.
"Tout semble indiquer que 2016 sera l'année la plus chaude qui ait été observée depuis le début des relevés et que la température moyenne sera même supérieure au record établi en 2015". Avant même que l'année ne soit totalement écoulée, l'Organisation météorologique mondiale (OMM) a la certitude qu'elle s'inscrira dans les annales de l'histoire climatique.
Le niveau des températures dans l'atmosphère a été supérieur de 1,2°C celui de la fin du XIXe siècle. Et 2016 est encore plus chaude que 2015, qui avait déjà battu un record avec un mercure plus élevé de 1°C par rapport à la fin du XIXe.
Les températures sont montées en flèche les premiers mois de l'année en raison du puissant épisode El Niño de 2015-2016. Elles sont restées haute jusqu'en octobre. Avec le nouveau record de 2016, le XXIe siècle compte 16 des 17 années les plus chaudes constatées depuis le début des relevés (l'autre étant 1998).
Dans l'Arctique, 20°C de plus que la moyenne
Les onze derniers mois ont enchaîné les records de température. En juillet, le thermomètre a frôlé les 54°C à Bassorah, en Irak, et les a atteint à Mitribah au Koweït. De nombreuses stations ont enregistré des records de chaleur absolus, selon l'OMM : 42,7°C à Pretoria et 38,9°C à Johannesburg en Afrique du Sud. La Thaïlande a connu un nouveau record national (44,6°), tout comme l'Inde, où le mercure a atteint 51°C a Phalodi.
Dans l'Arctique, cet automne, les températures ont dépassé d'environ 20°C la moyenne habituelle ! La banquise a fondu comme neige au soleil. Sa surface a été nettement inférieure à la normale pendant toute l'année. Elle a atteint un minimum saisonnier en septembre de 4,14 millions de kilomètres carrés. Au deuxième rang des minimums observés (à égalité avec 2007) après celui de 2012.
En France, la situation a été contrastée : un hiver chaud mais un printemps frais.
Ouragans et incendies
Ces tristes records se sont accompagnés de phénomènes naturels violents comme l'ouragan Matthew qui a dévasté Haïti, ou l'incendie le plus destructeur de l'histoire du Canada en mai dans la province de l'Alberta.
La cause de ce nouveau record est double : le phénomène El Niño - courant chaud - et le réchauffement climatique lié à l'accumulation de gaz carbonique et de méthane dans l'atmosphère. "En 2015, la teneur de l'atmosphère en dioxyde de carbone a atteint, pour la première fois, 400 parties par million (ppm) en moyenne annuelle. Les premières observations indiquent que de nouveaux records ont été établis en 2016", note l'OMM. Sans compter que le méthane - gaz encore plus problématique que le CO2 pour le réchauffement climatique - progresse aussi à une vitesse vertigineuse. L'année 2017 ne devrait pas battre le record de 2016, mais restera encore très chaude. E.B.
■ Des épisodes caniculaires
D'inhabituelles vagues de chaleur ont touché l'Europe. Des épisodes caniculaires intenses ont été relevés fin août en France. 36,9° C à Metz, 36°C à Strasbourg, 34,9°C à Dijon... et 36,6°C à Paris, la température la plus élevée mesurée fin août depuis le début des relevés.
■ La sécheresse s'installe
Conséquence du réchauffement climatique et de la sécheresse : en Californie, les réservoirs d'eau disparaissent peu à peu, à l'instar du lac Folsom, niché au pied de la Sierra Nevada. Ce lac de barrage de 46,3 km2, existant depuis 1955, est quasiment à sec aujourd'hui.
■ Le risque d'incendies accru
Au cours des trente dernières années, le réchauffement aurait été le principal contributeur à l'augmentation des superficies forestières parties en fumée dans l'ouest des États-Unis. En août, plus de 80 000 personnes ont dû être évacuées en Californie.
■ Des nuits sans fraîcheur
Le 21 juillet, le record du monde de température extrême a été égalé à Mitribah, au Koweït : 54°C. Cette valeur est la même que celle détenue par la Vallée de la mort, aux États-Unis. Les nuits dans le Moyen-Orient sont aussi sans fraîcheur, entre 28°C et 30°C.
■ Les pieds dans l'eau
Fin mai, de fortes pluies ont été suivies de crues et inondations dans le Centre et le Loiret sur le Loing, puis la Seine à Paris et en Normandie. Une atmosphère plus chaude peut transporter 7 % d'humidité en plus par degré de réchauffement.
■ La nature mise en péril
La Grande Barrière de Corail blanchit à vue d'oeil... Le plus grand récif corallien au monde, de 348 000 km2, au nord-est des côtes australiennes, est menacé par deux phénomènes : l'augmentation de la température de l'eau, mais aussi l'acidification des océans.
Jean Jouzel, climatologue
"C'est aussi la hausse au niveau de la mer"
Pourquoi l'année 2016 a-t-elle enregistré un nouveau record de chaleur ?
Ce record de température est lié en partie au phénomène El Niño, qui est resté relativement présent une bonne partie de 2016. Mais ce courant marin chaud n'explique pas tout. Les derniers mois de l'année ont aussi enregistré des records de température. Ces températures élevées s'inscrivent dans un contexte de réchauffement climatique : ce n'est pas seulement la hausse des températures dans l'atmosphère, c'est aussi la hausse du niveau de la mer à cause de la dilatation des océans et de la fonte des glaces.
Le rythme du réchauffement s'est-il accéléré ?
Nous venons d'enchaîner trois années avec des records de température importants : 2014, 2015 et 2016. En deux ans, l'écart de température est plus élevé de deux dixièmes de degré. En général, c'est sur une décennie que l'on gagne autant. A priori, il n'y aura pas de nouveau record de chaleur en 2017, grâce au phénomène La Niña, courant marin froid.
Quelles sont les conséquences ?
À part pour certains phénomènes, comme les récifs coralliens qui ont beaucoup souffert cette année, il est difficile d'attribuer des conséquences précises au réchauffement de l'année 2016. Le vrai réchauffement, avec la multiplication de ses conséquences - sécheresse, événements climatiques extrêmes... - interviendra d'ici la fin du siècle. Les températures ne vont pas augmenter de deux dixièmes mais de 3 à 4 degrés si nous ne faisons rien.
Quel risque fait peser l'élection de Donald Trump ?
La dynamique de la Cop 22n chargée de mettre en oeuvre les engagements de l'accord de Paris sur le climat, a été fragilisée par l'élection du président américain climato-sceptique. Il y a aussi des inquiétudes dans la communauté scientifique américaine de ne pas pourvoir poursuivre les recherches. Mais il y a aussi des signes d'espoir. Le gouverneur de la Californie a dit qu'il poursuivrait ses efforts quel que soit le contexte national américain. Et la Chine a dit qu'elle continuait sur les mêmes objectifs de lutte contre le réchauffement. Recueilli par Élodie Bécu
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