le Progrès du mardi 7 juin 2016
SÉCURITÉ - COMPÉTITION EN ÉTAT D'URGENCE
La protection de l'Euro 2016 vire au casse-tête
Une menace terroriste récurrente, des forces de l'ordre au bord de l'épuisement, des sites difficiles à contrôler : à J-3, portrait du dispositif hors-norme déployé pour protéger le championnat d'Europe de football.
Huit millions de supporteurs et spectateurs attendus dans dix villes hôtes. Et sans doute près de 100 000 policiers, gendarmes et agents de sécurité privée, soit plus que la capacité du stade de France. C'est un dispositif sécuritaire sans précédent qui va être déployé à partir de vendredi, jour de l'ouverture en France de l'Euro de football.
En période d'état d'urgence, quelques mois après les attentats de novembre à Paris et en pleine contestation sociale, l'événement sera évidemment placé sous haute surveillance. À quoi faut-il s'attendre ? Le climat anxiogène est encore monté en température hier avec la révélation de l'arrestation d'un Français en Ukraine. "Les menaces sont là depuis longtemps, comme celles portées directement sur l'Euro, souligne Alain Bauer, professeur de criminologie aux Arts et métiers. Le 13 novembre, c'est d'abord le Stade de France qui était visé...".
C'est un agent de sécurité privée qui a évité ce jour-là que les kamikazes ne s'introduisent dans les tribunes lors du match France-Allemagne. Ces agents seront 13 000 pour l'Euro, plusieurs milliers recrutés en urgence. Et parmi eux, 82 personnes fichées par la DGSI (Direction Générale de la Sécurité Intérieure) n'ont pas été accréditées...
"Beaucoup a été fait, l'essentiel de ce qui se fait est ce qui ne se voit pas, précise Alain Bauer. Les services de renseignement font bien leur métier, beaucoup d'opérations de tous les services occidentaux ont été effectuées avec une certaine efficacité préventive".
Autre sujet d'inquiétude : les supporteurs. "On peut craindre aussi des heurts à connotation raciste, note également Jean-Yves Camus, spécialiste des mouvements d'extrême droite, mais l'unité anti-hooligan est préparée à ce genre d'événement".
Fan-zones, le sujet qui fâche
Mais le problème le plus difficile à gérer sera sans doute les fan-zones, où les amateurs de ballon rond pourront voir les matchs sur écran géant. Le préfet de police de Paris avait menacé de fermer celle de la tour Eiffel durant les matchs s'il n'obtenait pas des renforts. Il en a obtenu 3 000 hier. "La fan-zone est une aberration absolue avec au minimum des risques au niveau des mouvements de foule, on est très préoccupés", nous racontait hier un officier de police spécialisé dans la maintien de l'ordre.
Un souci majeur qui s'ajoute à l'épuisement des forces de l'ordre mobilisées depuis les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher en janvier 2015. "On est sur les rotules, physiquement et opérationnellement", poursuit le policier, "nos politiques n'ont pas pris la mesure de la situation qu'imposait un tel événement dans ce contexte".
Le Premier ministre Manuel Valls a récemment affirmé que "renoncer aux fan-zones, ce serait céder au terrorisme". Mais ponctuellement, les autorités n'excluent rien. Xavier Frère
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