le Progrès du mercredi 4 novembre 2015
ISRAEL - Yitzhak Rabin, 20 ans après. Il avait signé les accords d'Oslo, en 1993 avec Arafat. Le 4 novembre 1995, un extrémiste juif assassinait de trois balles dans le dos le Premier ministre travailliste, Rabin, à l'issue d'un rassemblement pour la paix à Tel Aviv pour faire capoter les accords de paix avec les Palestiniens.
Et si Rabin n'avait pas été tué il y a 20 ans, Israéliens et Palestiniens auraient-ils vécu en paix ? Le souvenir de l'assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin, il y a 20 ans, pousse les Israéliens à interroger le présent et l'avenir. Des dizaines de milliers d'Israéliens - jusqu'à 100 000 disent certains médias - se sont massés samedi soir à Tel-Aviv sur la place où Rabin a été assassiné le 4 novembre 1995, et qui porte désormais son nom. Israël n'avait plus connu de tel rassemblement de gauche depuis longtemps.
Rabin, l'ancien héros de la guerre des Six jours ayant fait le choix de la paix au point de recevoir le prix Nobel (avec son rival Shimon Peres et le leader palestinien Yasser Arafat) en 1994, en était le héros à leurs yeux. Dans la foule sombre, la plupart admettaient que la paix n'avait jamais paru aussi lointaine aujourd'hui. Un nouvel enchaînement de violences oppose Israéliens et Palestiniens, dont les dirigeants ne se parlent plus depuis des mois. Après une série de méfaits de l'extrême droite, tout le monde avait à l'esprit, place Rabin, qu'un autre attentat comme celui de 1995 était possible.
Un accord ?
Au moment où Bill Clinton, l'ami de Rabin, exhortait la foule à "achever le dernier chapitre de l'histoire" écrite par Rabin, le ministre israélien des Sciences Ofir Akunis, membre de l'un des gouvernements les plus à droite de l'histoire, affirmait que "l'idée de deux Etats (israélien et palestinien) est morte", selon le quotidien Maariv.
Dans un tel contexte, beaucoup se posent la question : "Que se serait-il passé si Rabin n'avait pas été assassiné ?" Si Rabin avait eu un mandat de plus, "nous serions parvenus à un accord permanent avec les Palestiniens", assure Ouri Savir, négociateur en chef entre 1993 et 1996 des accords d'Oslo, qui devaient jeter les fondations d'un Etat palestinien.
Après l'assassinat de Rabin par l'extrémiste Yigal Amir, la gauche a perdu les élections et Benjamin Netanyahou a pris la tête du pays pour la première fois. "Il s'est employé à démanteler minutieusement tout ce qui était prévu", affirme Ouri Savir. "Si Rabin était en vie, il serait aujourd'hui un retraité nonagénaire hyperactif comme Peres, et Netanyahou serait quand même Premier ministre et continuerait d'expliquer pourquoi tout est de la faute des Palestiniens", estime, amer, Anshel Pfeffer, éditorialiste du Haaretz.
Pour les Palestiniens, Rabin est une figure ambiguë. Ils n'ont pas oublié qu'alors ministre de la Défense, il appelait à "briser les os" des émeutiers lors de la première intifada. Le président palestinien Mahmoud Abbas l'a cependant cité dans son discours à l'ONU fin septembre, s'appropriant ses mots pour mettre en garde contre le "cancer" de la colonisation. Aujourd'hui, comme la direction palestinienne, Rabin incarne pour le Palestinien de la rue l'échec d'Oslo.
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