le Progrès du samedi 2 avril 2016
PÉDOPHILIE - D'UNE AFFAIRE À L'AUTRE. COMMENT LYON EST ENTRÉ DANS LA TOURMENTE
Les dossiers concernant des prêtres soupçonnés d'agressions sexuelles s'accumulent pour le diocèse de Lyon. Mais tous n'en sont pas au même stade.
Le dossier Preynat, le détonateur
C'est par lui que le scandale est arrivé. A l'issue d'une enquête préliminaire ouverte au printemps 2015, le prêtre a été mis en examen le 27 janvier pour agressions sexuelles sur des scouts lyonnais entre 1986 et 1991. Des faits qu'il a reconnus. Sur une soixantaine de victimes, une quinzaine a déposé plainte mais pour seulement quatre d'entre elles, les faits ne sont pas prescrits. L'instruction est en cours.
Affaire Gérentet et Saluneaux, l'autre dossier de pédophilie
Hasard du calendrier, ce prêtre qui officiait dans le 8e a été jugé le 12 février 2016 par le tribunal correctionnel de Lyon, pour des agressions sexuelles commises sur des jeunes filles entre 1989 et 2000. Il avait été mis en examen en mars 2010. Et suspendu par l'église dès 2001, contrairement au père Preynat qui a travaillé jusqu'en 2015. Ces deux dossiers sont les seules affaires de pédophilie à ce jour. Autrement dit qui concernent des victimes qui sont des mineurs de moins de 15 ans.
La non-dénonciation, le déclic
Le 4 mars, le parquet a ouvert une enquête préliminaire qui vise le cardinal Barbarin et cinq autres responsables religieux, dont deux laïcs, concernés par quatre plaintes de victimes qui leur reprochent de ne pas avoir dénoncé les faits aux autorités judiciaires au moment où ils en ont eu connaissance. L'enquête est en cours. Une perquisition a eu lieu dans ce cadre cette semaine à l'archevêché. Cette procédure semble avoir provoqué un déclic pour des victimes d'autres dossiers, dont les témoignages affluent sur le site de l'association de victimes du père Preynat, "La parole libérée". Rarement une association ne semble avoir aussi bien porté son nom.
Des victimes collatérales ?
Depuis, les langues se délient et une tempête médiatique s'est abattue sur Fourvière. Le nom d'un prêtre du 6e est d'abord apparu, suite à des faits remontant à 1990 sur une victime qui avait 16 ans. Des faits classés sans suite pour cause de prescription. Par contre, la victime reproche également au cardinal Barbarin, mis au courant en 2009, de ne pas avoir agi. Le prêtre concerné a été contraint de se mettre en retrait.
Puis c'est le dossier d'un autre prêtre du diocèse qui ressort. Il a été condamné en 2007 dans l'Aveyron pour agression sexuelle sur une personne majeure. Muté à Lyon depuis, il est promu en 2013 à la tête de plusieurs paroisses, ce qui fait d'autant plus désordre dans le contexte actuel. Ce prêtre est contraint lui aussi de s'effacer. Dans ces deux dossiers, nous ne sommes plus sur un terrain judiciaire, mais moral.
Cette semaine, un curé du 2e voit aussi son passé remonter à la surface. Il en avait fait, en 2006, l'objet d'une plainte de la part d'une jeune fille. Son âge n'est pas connu, mais ne l'expose pas, au sens judiciaire, à des faits de pédophilie. La victime s'est-elle à nouveau manifestée ou bien d'autre témoignages sont-ils arrivés? Le parquet a ouvert une enquête préliminaire afin de vérifier s'il existe de nouveaux éléments. C'est ni plus ni moins la procédure normale lorsqu'il est saisi d'une plainte. Hier, le prêtre éclaboussé par ce dossier a déclaré que les faits se seraient déroulés alors qu'il n'était pas encore prêtre. Xavier Breuil
Bertrand Virieux Secrétaire de "La parole libérale"
"L'Église doit adopter la tolérance zéro"
Un prêtre récemment condamné, un autre à nouveau soupçonné. Que vous inspirent ces dossiers ?
Nous sommes un peu désabusés. On pensait que notre seul dossier du père Preynat était déjà énorme, et on se retrouve avec des tas d'affaires qui ressortent. Sur notre site, c'est désormais un flot continu de témoignages. On est totalement dépassés par l'ampleur.
Maintenant que vous avez ouvert la boîte de Pandore, jusqu'où cela peut aller ?
Nous ne sommes pas dans la délation, ni des chasseurs de primes. On ne s'est jamais placé sur le terrain judiciaire, mais moral. Notre dossier, c'est celui du père Preynat. Nous n'avons donc pas vocation à durer, ni l'intention de devenir l'association référente en matière de pédophile. Si une devait le devenir, c'est l'Église.
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