le Progrès du vendredi 18 décembre 2015
VACANCES - Après une année éprouvante. Fin 2015 : les Français ont besoin de souffler. Des retrouvailles, des cadeaux, du repos : les Français ont besoin de souffler après une année 2015 marquée par une actualité particulièrement tragique et anxiogène. Les vacances tombent à point.
2015, annus horribilis : ces douze derniers mois ont été ponctués d'attaques terroristes sur le territoire, depuis la tuerie de Charlie Hebdo le 7 janvier, jusqu'au massacre en plein Paris le 13 novembre. Entre-temps, rien de moins que la prise d'otages de l'Hyper Cacher porte de Vincennes le 9 janvier, l'attentat manqué de Sid Ahmed Ghlam à Villejuif le 19 avril, le patron décapité de Saint-Quentin-Fallavier le 26 juin, l'attaque manquée du Thalys Amsterdam-Paris le 21 août.
Une actualité particulièrement tragique et anxiogène, à laquelle sont venus s'ajouter de dramatiques accidents : notamment celui de la Germanwings le 24 mars, et le Puisseguin le 23 octobre.
Morosité économique
Et ce n'est pas la morosité économique qui a pu redonner le moral aux Français : en octobre, la France a encore décompté 42 000 chômeurs de plus (+ 1,2 %). C'est la plus forte hausse depuis 2013, pour un total de 3,59 millions. Sur un an, le nombre d'inscrits à Pôle emploi a augmenté de 3,7 %.
Les experts confirment, les Français sont angoissés. Une preuve flagrante ? L'explosion de la consommation d'anxiolytiques et de somnifères. Selon une étude de la Celtipharm, elle a augmenté de 18,2 % consécutivement aux attentats du 7 janvier.
Des fêtes au calme, ou à l'autre bout du monde
Stéphane Clerget, psychiatre à Paris, le confirme : le climat est lourd derrière la porte de son cabinet. Nombre de ses patients émettent même le souhait de partir vivre en dehors de la capitale, voire parfois dans un autre pays.
Ces vacances de Noël arrivent donc à point. Elles vont, il faut l'espérer, permettre de souffler un peu après cette année éprouvante. Comment les Français vont-ils les mettre à profit ? "En se mettant au vert", témoigne Didier Arino, directeur de Protourisme. "Des destinations "campagne" comme la Drôme, par exemple, fonctionnent très bien", d'autant que la neige manque en montagne. "La plupart des grandes villes ont moins de succès que l'habitude pour ces fêtes de fin d'année", renchérit Vincent Wermus, directeur général de HomeAway France, qui détient Abritel, portail spécialisé dans la location entre particuliers.
"Après le terrible mois de novembre, les Français aspirent à de la sérénité, ils souhaitent se ressourcer dans des lieux tranquilles et intimistes". Autre option choisie par les familles au budget plus aisé : s'envoler loin, très loin, pour oublier. Didier Arino le confirme : les vols longs courriers font le plein. Direction la Thaïlande, Cuba... Les gens n'ont pas peur de prendre l'avion, mais ils privilégient des destinations bénéficiant d'une image sûre, du coup, le Maghreb souffre. "Les paysans musulmans en général sont clairement touchés", complète Jean-François Rial, PDG de Voyageurs du Monde. "Après les attentats, nous avons eu des annulations pour la Jordanie, et plus du tout d'inscriptions pour la Tunisie et le Maroc".
Surtout, Noël sera encore plus que les autres années l'occasion de chaleureuses retrouvailles familiales. Parce que la famille reste une valeur refuge en temps de crise et de coups durs. Un retour aux sources pour redémarrer du bon pied en 2016... Sarah Miquey-Pallandre
"La France garde intacts ses principes d'espérance et de tolérance. L'épreuve nous a tous meurtris mais elle nous rend plus forts". François Hollande - Hommage national aux Invalides
94 % La perception d'une menace terroriste élevée reste prégnante chez une très large majorité de Français (94 %). Toutefois, malgré l'angoisse, 89 % déclarent ne pas avoir changé leurs habitudes quotidiennes (déplacements, sorties...) depuis les attaques du 13 novembre.
Un château pour policiers épuisés
En Indre-et-Loire, se cache un château différent des autres. Le château du Courbat, à Liège, transformé en centre de soins, accueille essentiellement des policiers et des gendarmes, victimes de dépression et de burn-out, le syndrome d'épuisement professionnel. Il faut dire que tout au long de l'année, et encore davantage depuis la mise en place de l'état d'urgence, une mobilisation maximale a été exigée de la part des membres des forces de l'ordre.
Alors certains craquent usé, cassés. Louis (le prénom a été changé), agent de la Brigade anti-criminalité, est actuellement en arrêt pour burn-out : "C'est un métier dans lequel on n'est jamais serein. On voit des horreurs, et puis on rentre chez soi. Les souvenirs s'accumulent, alors on se met à picoler. A prendre des drogues. Tu fais n'importe quoi pour voir les choses autrement. Et en fait, tu te détruis".
Du sport pour évacuer les souffrances
Au château du Courbat, véritable havre de verdure, ceux qui sont à terre viennent se reconstruire, hospitalisés durant un à deux mois. L'établissement est géré par l'Association nationale d'action sociale des personnels du ministère de l'Intérieur (Anas). A l'intérieur, un programme personnalisé est proposé à chacun, notamment composé d'activités sportives, pour évacuer les souffrances et rependre confiance. Et des appels quotidiens rythment la journée, histoire de se préparer au retour à la vie normale. S. M.-P.
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