le Progrès du vendredi 19 février 2016
INTERNATIONAL - Recherche. Une bactérie pourrait faire grandir les enfants malnutris. Une bactérie intestinale, dont l'efficacité vient d'être prouvée chez la souris par une équipe lyonnaise, pourrait être utilisée dans des suppléments alimentaires.
S'il existe des solutions pour faire prendre du poids aux enfants souffrant de malnutrition aiguë ou sévère - dont la plus célèbre est Plumpy Nut, une pâte d'arachide fabriquée par la société normande Nutriset - il n'existe aucun produit capable de rattraper les retards de croissance dont souffrent les 165 millions d'enfants victimes de malnutrition chronique.
Cependant, une étude publiée aujourd'hui dans Science ouvre l'espoir de mettre au point un tel supplément nutritionnel. Des chercheurs de l'Institut de génomique fonctionnel de Lyon, du laboratoire CarMeN et de l'unité BF21 ont montré pour la première fois le rôle de certaines souches de bactéries intestinales, appartenant à l'espèce Lactobacillus plantarum, dans le contrôle de la croissance.
Alors qu'on recense une quinzaine d'espèces de lactobacilles mais des milliers de souches pour chacune, "c'est le hasard du travail sur la mouche drosophile qui nous a fait découvrir cette fonctionnalité marquée chez l'insecte. On s'est alors demandé si on pouvait la transposer chez la souris", raconte François Leulier, chercheur à l'IGFL. Ces expériences ont montré que les souris n'ayant qu'une seule souche particulière de Lactobacillus plantarum dans leur flore intestinale, soumises à une nutrition standard ou à une sous-nutrition chronique, produisent davantage de facteurs de croissance IGF-1, prennent plus de poids et grandissent mieux que les souris sans flore intestinale ou ayant une flore colonisée par une autre souche de lactobacille.
Désormais, les chercheurs essaient de comprendre les mécanismes de cette influence et de voir si une supplémentation avec cette souche de Lactobacillus plantarum a les mêmes effets sur des souris ayant un microbiote intestinal naturel. On est encore loin des essais chez l'homme mais l'espoir est bien là de fabriquer un aliment capable de rattraper les retards de croissance chez les enfants malnutris et de "favoriser une croissance saine dans le population générale".
"Le gros avantage, c'est que ces souches ne sont pas dangereuses. Elles sont faciles à manipuler - on peut les introduire dans un yaourt - que ce soit en laboratoire ou au niveau industriel", explique François Leulier. S'il voit le jour, ce produit serait le premier aliment enrichi en probiotique à posséder un effet thérapeutique prouvé scientifiquement alors que l'Agence européenne de sécurité des aliments a jusqu'à présent retoqué toutes les allégations santé des produits existants, faute de preuve. Sylvie Montaron
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