le Progrès du vendredi 6 janvier 2017
PATRIMOINE - FISCALITÉ DES SUCCESSIONS
Héritier rend plus riche que travailler
La richesse des Français vient moins de ce qu'ils gagnent par leur travail que de ce qu'ils possèdent et héritent. Une situation qui, sans réforme fiscale, ne peut que s'accentuer.
La France serait-elle une société d'héritiers ? Où la position sociale dépendrait moins du mérite de chacun, que des "rentes de situations héritées d'une génération à l'autre ?" Pas encore, mais on y va tout droit, répond une étude de France Stratégie. Et la seule manière d'y échapper est de modifier la fiscalité sur l'héritage.
Une terre de patrimoines
Les Français sont plus riches de ce qu'ils possèdent (ou héritent) que de ce qu'ils gagnent mois après mois. Leur patrimoine représente 8 années de leurs revenus, une proportion plus élevée que chez nos voisins. Et la cause première n'en est pas le boum immobilier : sur le long terme, c'est plutôt la part financière qui augmente.
Une fiscalité progressive
Ce patrimoine est réparti de manière très inégalitaire. Entre l'ensemble des Français, avec 10% des plus fortunés en détenant la moitié. Et entre générations, une part croissante de ce patrimoine étant possédée par les plus âgées. Ces écarts tendent à s'aggraver, à cause d'héritages transmis toujours plus tard, et d'une forte augmentation à venir de la richesse transmise, avec la disparition de la génération des baby-boomers. S'esquisse ainsi "une société à deux vitesses, où le patrimoine serait hérité à un âge avancé par une petite partie de la population", écrit Clément Dherbécourt.
La fiscalité n'arrange rien. Elle est peu progressive, en premier lieu à cause de l'abattement de 100 000 euros par enfant. Elle l'est encore moins avec l'encouragement fiscal aux donations, qui favorise les gros patrimoines. Une part de 500 000 euros, taxée à 15,6 % au décès à un héritier en ligne directe, ne le sera plus qu'à 8,5 % si elle a été transmise en trois fois par donation.
En revanche, pour les patrimoines plus modestes, l'abattement a le désavantage de décourager les transmissions avant décès, qui permettraient une meilleure circulation du capital vers les jeunes générations. Ce reproche vaut aussi pour l'allègement fiscal sur la transmission d'entreprise, rendue plus intéressante que la cession.
Le système français privilégie enfin la parenté la plus proche, le conjoint marié et les enfants. "Un million d'enfants vivent dans des familles recomposées", rappelle le président de France Stratégie, Jean Pisani-Ferry. Ces enfant peuvent établir des liens privilégiés avec un beau-parent dont ils restent, au yeux du fisc, un total étranger...
La fiscalité de l'héritage sera-t-elle dans le débat présidentiel ? C'est évidemment le souhait de France Stratégie, qui avance quelques propositions comme une subvention (sorte d'impôt négatif) à la transmission des plus petits patrimoines, ou une dotation universelle de patrimoine - idée évoquée par l'ex-futur candidat François Hollande. À suivre... Francis Brochet
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