Franceinfo - le lundi 1er mai 2019 - mis à jour le 02.05.19
Heurts, commissariat attaqué, syndicaliste exfiltré... Ce qu'il faut retenir de la manifestation du 1er-Mai à Paris
Des violences ont éclaté lors de ce grand rendez-vous social, mais sans faire de Paris la "capitale de l'émeute" comme le réclamaient plusieurs "gilets jaunes" sur les réseaux sociaux
Un "gilet jaunes" devant un nuage de gaz lacrymogène, à Paris, le 1er mai 2019. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)
Pluie de pavés, jets de grenades lacrymogènes, vitrines vandalisées... A Paris, le défilé parisien du 1er-Mai a tourné à la bataille rangée entre manifestants et forces de l'ordre. A 19 heures, 330 personnes avaient été interpellées et 210 placées en garde à vue, selon le ministère de l'Intérieur.
D'après un comptage indépendant effectué pour plusieurs médias, dont franceinfo, par le cabinet Occurrence, 40 000 manifestants ont défilé dans les rues de la capitale. Voici ce qu'il faut retenir de la manifestation parisienne.
Des affrontements et un commissariat visé
Des heurts ont vite éclaté entre les forces de l'ordre et des manifestants réunis en black bloc autour de la gare Montparnasse, dès 13 heures, avant même le début de la manifestation. "Le début de la manifestation a été très compliqué. Nous avons été confrontés à des violences sans précédent", raconte à franceinfo Mélanie Luce, présidente de l'Unef.
Malgré des débuts tendus, le cortège a rejoint la Place d'Italie où de nouveaux affrontement ont éclaté. Selon un journaliste de France Télévisions présent sur place, des black blocs ont lancé des projectiles sur le commissariat de police du 13e arrondissement et ont tenté d'enfoncer les barrières anti-émeutes qui protégeaient le bâtiment. La police a répondu par des jets de grenades lacrymogènes.
Des manifestants ont, par ailleurs, mis le feu à des poubelles et à une voiture. Une agence d'assurance, une agence bancaire et plusieurs commerces ont été vandalisés, d'après des journalistes de l'AFP sur place.
Des militants du black bloc présents mais moins de violence que prévu
Les autorités craignaient un 1er-Mai apocalyptique avec "1 500 black blocs" attendus, selon Christophe Castaner. Finalement, ils semblaient être moins nombreux, même si aucun chiffre sur la présence de ces militants radicaux n'a été communiqué par les autorités.
"Nous n'avons pas eu de constitution de black blocs au sens strict du terme, s'est félicité auprès de franceinfo David Le Bars, le secrétaire général du SCPN, syndicat des commissaires de la police nationale. Avec plus de confiance et de réactivité, le fait d'aller plus rapidement sur ces groupuscules, on les a dérangés."
Ces affrontements ont tout de même fait 24 blessés parmi les manifestants. Au moins une personne a été "touchée à la mâchoire par un tir de LBD", ont affirmé à l'AFP des "street medics". Du côté des policiers, 14 membres des forces de l'ordre ont été blessés légèrement. Un CRS, blessé à la tête a été "pris en charge en milieu hospitalier" et est "en urgence relative", a indiqué la préfecture de police de Paris.
Un dispositif policier très important
Mardi, lors d'une conférence de presse, Christophe Castaner avait annoncé le déploiement de 7 400 policiers et gendarmes pour le défilé parisien, parmi lesquels des binômes de policiers sur 190 motos. D'après le préfet de police de Paris, Didier Lallement, des drones ont même été utilisés pour filmer et suivre les manifestants violents.
La préfecture de police a aussi mis en place un dispositif de contrôle aux abords des principales gares et stations de métro ou de RER. Dès 13h15, avant même le début de la manifestation, 9 016 personnes ont été contrôlées et 165 ont été interpellées.
Une vingtaine de membres de l'escadron de la Garde républicaine – dont la mission est, entre autres, de sécuriser les déplacements en voiture d'Emmanuel Macron – ont aussi été déployés pour sécuriser la manifestation. Il s'agit "pour le moment seulement d'une expérimentation", assure la gendarmerie nationale à franceinfo. Un premier test a eu lieu, samedi 20 avril, toujours dans les rues de Paris, à l'occasion d'une journée d'action des "gilets jaunes".
Le restaurant La Rotonde barricadé
La photo, impressionnante, a fait le tour des réseaux sociaux. On y voit des dizaines de policiers, en rang, déployés pour protéger le restaurant La Rotonde, situé sur le boulevard du Montparnasse.
Pourquoi un tel dispositif a-t-il été déployé pour protéger cette brasserie ? Après la dégradation du Fouquet's, quelques semaine plus tôt, le propriétaire des lieux craignait que les manifestants ciblent ce restaurant devenu un symbole du quinquennat d'Emmanuel Macron depuis que ce dernier y a célébré sa qualification au second tour de l'élection présidentielle.
Philippe Martinez temporairement évacué du cortège
Fait inattendu : le secrétaire général de la CGT a été contraint de quitter temporairement le cortège, en début de manifestation, à cause des violences. D'après des témoins sur place, interrogés par franceinfo, Philippe Martinez a été évacué par le service d'ordre du syndicat "après avoir été pris à partie par des black blocs."
Devant les journalistes, le chef de file de la CGT a accusé les forces de l'ordre. "La police a chargé la CGT, c'est grave parce qu'on est identifiés quand même", a-t-il affirmé pendant la manifestation, avant de préciser, sur le plateau de franceinfo : "J'avais rendez-vous avec vos confrères pour un point de presse traditionnel. Vers 13h45, il y a eu des échauffourées dans le carré de tête. Les forces de l'ordre sont intervenues et ont visé une camionnette de la CGT qui ouvre le cortège". Philippe Martinez évoque ensuite "des gaz lacrymogènes et une volonté délibérée d'affrontements".
La préfecture a rapidement réagi aux accusations proférées par Philippe Martinez. "La CGT n'a jamais été la cible des policiers et de gendarmes qui ont assuré leur mission avec détermination face à des casseurs violents", a-t-elle assuré sur Twitter.
Les syndicats dénoncent la "pression policière"
Comme la CGT, plusieurs syndicats se sont tout de même émus des violences survenues lors de ce grand rendez-vous social. "On a vu des charges de CRS très importantes, des grenades de désencerclement ont été lancées à quelques mètres de nous", a expliqué à franceinfo la présidente de l'UNEF, Mélanie Luce.
De son côté, porte-parole de Solidaires Eric Beynel a mis en cause le dispositif policier exceptionnel mis en place pour cette journée. "On n'a pas arrêté d'être harcelés par les forces de l'ordre. J'ai dû répondre à une interview avec un masque à cause des gaz lacrymogènes", a raconté le syndicaliste, avant d'affirmer : "Ceux qui ont essayé de nous voler le 1er-Mai, ce ne sont ni les 'gilets jaunes' ni ceux qu'on appelle les 'radicaux', mais c'est le gouvernement, en mettant cette pression policière aussi folle."
Certains ont d'ailleurs rebroussé chemin. Le syndicat FSU a ainsi annoncé à franceinfo avoir quitté le cortège, au cours de la manifestation parisienne, "en raisons des violences". "C’est assez douloureux quand on est syndicaliste de se dire qu’on ne peut pas manifester le 1er-Mai. Il y a beaucoup de tristesse, de colère et d’incompréhension", a regretté Bernadette Groison, secrétaire générale du syndicat de la fonction publique.
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