le Progrès du vendredi 9 septembre 2016
MOYEN-ORIENT - DIPLOMATIE. À LA MECQUE, LE PÈLERINAGE DE LA DISCORDE
Un million et demi de musulmans sont attendus pour le hadj. Le pèlerinage s'ouvre sur fond d'escalade diplomatique entre l'Arabie Saoudite et l'Iran, qui interdit à ses pèlerins de s'y rendre.
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e hadj, le grand pèlerinage que chaque musulman doit réaliser une fois dans sa vie, démarre aujourd'hui dans la ville sainte de la Mecque dans un climat de tensions inhabituelles. Les fractures au sein du monde musulman, entre chiites et sunnites, déjà perceptibles mais souterraines sur les terrains de guerre syrien et yéménite, en Irak ou au Bahreïn, ont éclaté au grand jour cette semaine.
L'Iran et l'Arabie Saoudite, qui ont rompu leurs relations en janvier 2016 après l'exécution par le royaume wahhabite d'un dignitaire chiite et l'attaque de l'ambassade saoudienne à Téhéran, ont redoublé de violences dans les attaques verbales.
Ali Khamenei, le guide suprême iranien, a ainsi fait référence à la bousculade géante du 24 septembre 2015, causant la mort de plus de 2 400 fidèles, dont 464 Iraniens : "Cette catastrophe montre une nouvelle fois que cette descendance maudite maléfique ne mérite pas de gérer les lieux saints" de l'islam (La Mecque et Médine), a attaqué Ali Khamenei, en recevant les familles des Iraniens défunts.
Faute d'accord avec les Saoudiens, l'Iran interdit cette année à ses ressortissants de se rendre à la Mecque, une première depuis plus de trente ans. En 1979 déjà, un autre ayatollah, Rouhollah Komeini, dénonçait la mainmise de la monarchie saoudienne sur le pèlerinage dans les lieux saints. Son successeur actuel vilipende également le côté mercantile (Selon les estimations saoudiennes, il rapporterait entre 6 et 9 milliards d'euros au pays) du hadj, "réduit", selon lui, "à un séjour touristico-religieux".
Défi logistique et sécuritaire
Alors que les premiers milliers de fidèles ont investi la Mecque, la riposte de Riyad ne s'est pas fait attendre. Le grand mufti saoudien Abdel Aziz ben al-Cheikh a affirmé que les Iraniens "n'étaient pas des musulmans" et que leur "hostilité envers les musulmans, plus particulièrement envers les sunnites, est ancienne".
Chaque année, le hadj, devenu un business très lucratif, connaît son lot d'accidents parfois mortels. Comme la chute d'une grue qui, le 11 septembre 2015, une semaine avant la bousculade mortelle, avait provoqué la mort de 112 fidèles au sein même de la Grande mosquée. Ou un mouvement de foule, déjà en 1990 : 1 426 personnes étaient mortes piétinées et asphyxiées.
Le défi logistique et sécuritaire sera encore plus grand cette année, alors que le royaume wahhabite est frappé de plein fouet par la crise économique, liée à la chute du prix du baril de pétrole. Sans compter la menace d'attentats : début juillet, durant le ramadan, une attaque kamikaze avait notamment été menée à Médine, l'une des villes saintes. Xavier Frère
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