le Progrès du jeudi 8 décembre 2016
CRIMINALITÉ - ENQUÊTE ANNUELLE SUR LES FRANÇAIS ET L'INSÉCURITÉ
Internet, nouveau lieu d'insécurité des Français
Selon l'enquête annuelle sur le ressenti de l'insécurité, la cybercriminalité est désormais au centre des inquiétudes es Français. La délinquance en ligne croit, quand les vols classiques reculent.
Pour les Français, le danger est de moins en moins au coin de la rue, et de plus en plus sur le Web. Selon l'enquête annuelle sur le sentiment d'insécurité, menée par l'ONDRP (Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales) et l'Insee, la proportion de personnes ressentant de l'insécurité près de chez elles est tombé de 21 % à 19,5% en un an. À l'inverse, les victimes d'actes de cybercriminalité sont toujours plus nombreuses. Plus de 1,1 million en 2015 pour seulement 500 000 en 2010. Deux fois plus que de domiciles cambriolés.
+ 160 % d'attaques en un an
Les systèmes d'alarme et de protection rendent la population moins vulnérable aux vols de voitures ou aux cambriolages. Les nouveaux fléaux se nomment chapardages de données bancaires ou usurpations d'identité. Les bandits modernes de l'internet s'attaquent directement aux ménages ou bien aux entreprises, banques et institutions auxquelles vous laissez vos informations personnelles. Parmi leurs méthodes favorites, le phishing (ou hameçonnage en français) tient toujours la tête d'affiche : un mail censé provenir d'une société ou d'une administration vous invite à vous connecter à une imitation d'un site légitime afin de dérober vos identifiants.
Autre menace qui prend de l'ampleur, le "ransomware" : les cyber-malfrats cryptent vos documents, photos et vidéos et vous proposent d'échanger la clé de déchiffrement contre une rançon, d'une centaine d'euros en général. Certains prennent même l'aspect d'avertissements d'agences gouvernementales ou de forces de police.
Des sociétés, des hôpitaux ou même la compagnie de transport municipal de San Francisco ont récemment été touchées. Selon l'entreprise Symantec, 391 000 attaques de ce genre ont été recensées en 2015 en France, une hausse de 160 % en un an. Ces "rançongiciels", se propagent par l'envoi de mails, mais aussi via des images piégées sur Facebook ou LinkedIn et qui exploitent une faille de sécurité.
Les réseaux sociaux sont ainsi devenus le terrain de jeu des cybercriminels. Symantec a recensé 300 000 arnaques sur les différentes plate-formes l'an dernier. Selon la société de cyber-sécurité Kaspersky Lab, un phishing sur cinq viserait désormais des notifications Facebook. Les renseignements que chacun laisse sur ces réseaux pourraient même être utilisés pour mieux cibler l'hameçonnage et accroître les "prises".
Police et gendarmerie s'organisent
Pour contrer cela, la France s'est assez tôt dotée de moyens humains et financiers. Dès 2001, un Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication était créé par la police judiciaire. En 2014, celui-ci s'est fondu dans une sous-direction de lutte contre la cybercriminalité, où travaillent 150 agents. Une plate-forme de signalement en ligne a été lancée, sous le nom de Pharos. La gendarmerie dispose également de sa propre structure : le centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N).
Mais la difficulté réside dans le caractère international de cette nouvelle criminalité : les délinquants peuvent se situer dans le pavillon d'à côté comme à l'autre bout du monde. Il aura ainsi fallu la collaboration des enquêteurs d'une trentaine de pays pour venir à bout, début décembre, du réseau Avalanche : une véritable multi-nationale du cybercrime, dont le butin est estimé à plusieurs centaines de millions d'euros. Alexis Boyer et Jean-Michel Lahire
Le terrorisme inquiète autant que le chômage
La vague d'attentats a changé le regard des Français en matière d'insécurité : le terrorisme est désormais leur première source de préoccupation. À 30,4 %, il bondit pour se retrouver quasiment au même niveau que le chômage (30,9 %), selon l'enquête annuelle de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales et de l'Insee. Une hausse spectaculaire : il y un an, le terrorisme n'était cité en tête que par 17,7 % des Français, loin derrière le chômage à 38,3 %. Et auparavant, il n'était cité comme une préoccupation majeure que par 5 % de nos concitoyens...
Dixième du genre, cette enquête a été réalisée auprès de 15 000 personnes âgées de plus de 14 ans, interrogées sur leur ressenti de l'insécurité et sur les faits de délinquances dont ils disent avoir été victimes pour l'année 2015 (sans que cela ait forcément donné lieu à un dépôt de plainte).
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